À Strasbourg, l’engagement de la collectivité locale a commencé grâce à l’association Ecoquartier, qui a tenté de lancer un projet d’écoquartier. Dans les premiers temps, face à l’absence de réactions ou réponses politiques, l’association s’est lancée dans un projet d’habitat participatif à haute qualité environnementale.
La ville de Strasbourg, intéressée, a décidé de lancer un premier appel à projets dédiée uniquement à l’habitat participatif, ce qui constituait alors une première en France.
L’habitat participatif a connu un essor sans précédent en France et en Europe depuis le début des années 2000. Il est vu comme un moyen de refuser la marchandisation et l’individualisme croissants de la société et d’avoir une prise sur son lieu de vie, en y intégrant des préoccupations économiques, sociales et environnementales.
Sans commune mesure avec l’offre standardisée des promoteurs immobiliers traditionnels, l’habitat participatif donne la possibilité d’intégrer des choix et des valeurs à son habitat. C’est cet espace de liberté qui fait de l’habitat participatif un intéressant outil pour la transition énergétique.
Selon le groupe d’habitants à son initiative, un projet d’habitat participatif peut être porteur d’enjeux et de valeurs variés, comme la solidarité, le respect de l’environnement, le droit au logement pour tous, la mixité sociale et intergénérationnelle ou encore la non-spéculation. Dans tous les cas, l’habitat participatif augure une nouvelle manière de fabriquer, construire et gérer l’habitat et la ville. Dans la lignée de l’économie sociale et solidaire, d’une réflexion sur la citoyenneté et le partage, l’habitat participatif rassemble des personnes mues par la volonté de participer aux politiques publiques en matière d’urbanisme et de bâti en faisant leurs propres choix de construction et d’aménagement. Mutualisation des coûts et de certains espaces vont souvent de pair, mais l’habitat participatif peut aller au-delà de ces caractéristiques, avec le choix de matériaux écologiques, la création de potagers, la mise à disposition de logements sociaux ou encore d’espaces pour la vie de quartier. Autant de démarches que les collectivités locales pourraient être intéressées à favoriser.
Quelle est la place des collectivités locales dans les projets d’habitat participatif ?
L’habitat participatif étant encore un objet récent et «expérimental» pour la plupart des acteurs impliqués, il demeure relativement peu connu des collectivités locales, françaises tout du moins, en dehors des membres du Réseau national des collectivités pour l’habitat participatif, créé pour partager leurs expériences sur le sujet. En effet, l’implication des collectivités peut s’avérer déterminante dans la concrétisation des projets.
Les rapports entre collectivité locale et groupes d’habitants
Krämer et Kuhn (2007) ont distingué trois catégories de rapports entre la collectivité locale et le groupe d’habitants portant le projet3: (1) la collectivité locale comme «acteur central du projet»; (2) un «modèle «tandem»qui permet un véritable partenariat entre l’institution et ses administrés, notamment par un travail d’accompagnement des projets par la municipalité»; et enfin, (3) la collectivité locale comme simple facilitateur du projet.
À Berlin, Hambourg, Amsterdam ou encore Montreuil, la ville a joué ce rôle de facilitateur, en aidant notamment les groupes à trouver du foncier, sans pour autant intégrer cette action dans ses politiques publiques urbaines. Néanmoins, l’essor de l’habitat participatif dans les années 2000 a réinterrogé ces liens. L’habitat participatif est devenu un outil de co-construction de la ville : les collectivités locales s’y investissent de plus en plus et parviennent à insérer les projets dans leur stratégie urbaine, environnementale ou sociale.
À Montreuil par exemple, l’habitat participatif n’a jamais été le cœur d’une politique publique particulière. «Toutefois, l’accompagnement qui est réalisé par la collectivité en faveur des initiatives et associations de l’habitat participatif signe l’intérêt qu’elle porte à la démarche et l’utilité sociale qu’elle lui reconnaît». ( Anne D’Orazio, L’habitat participatif à Montreuil. Une histoire, des initiatives collectives, une dynamique. Ville de Montreuil, Novembre 2011)
L’accompagnement de la collectivité locale
Celui-ci peut comporter plusieurs volets, souvent complémentaires :
-La communication autour de l’initiative;
-Le soutien technique (foncier, urbanisme, accompagnement technique et juridique…);
-Et le portage politique : à Montreuil, les projets Les Castors, LesBabayagas et l’Apaum ont compté sur la collectivité locale pour «obtenir un portage politique dans lequel les élus perçoivent l’exemplarité de l’opération, son contenu idéologique et l’intérêt médiatique qu’il suscite comme un intérêt pour eux-mêmes et vont pouvoir, avec leurs services, faciliter le montage du projet, en particulier à travers l’écueil de l’obtention du terrain».
Le soutien technique est grandement utile pour la constitution et la consolidation des groupes, ainsi que pour minimiser le décalage entre les attentes du groupe et la réalité, financière notamment. Mais le soutien politique de la collectivité locale permet également de légitimer les projets et facilite les démarches auprès des banques, des notaires, etc.
La ville de Strasbourg a quant à elle inscrit l’habitat participatif au cœur de ses politiques publiques, dans le cadre de son 4e Programme local de l’habitat de l’Eurométropole (2009) et de sa démarche «éco-quartiers» en faveur d’un aménagement et d’un habitat durable. La stratégie énergétique et la démarche d’habitat participatif sont de plus très liées grâce au suivi des deux sujets par un même élu.
Strasbourg: un essor fulgurant
À Strasbourg, l’engagement de la collectivité locale a commencé grâce à l’association Ecoquartier, qui a tenté de lancer un projet d’écoquartier. Dans les premiers temps, face à l’absence de réactions ou réponses politiques, l’association s’est lancée dans un projet d’habitat participatif à haute qualité environnementale. Elle en a fait son cheval de bataille et lorsque la municipalité lui a vendu un terrain et que le projet a abouti, elle a organisé des rencontres afin d’essaimer l’initiative en mobilisant d’autres groupes d’habitants motivés par l’idée. Ce changement de stratégie, en démontrant qu’il était possible de faire sortir de terre des références concrètes, a permis de mieux sensibiliser la collectivité locale. La ville de Strasbourg, intéressée, a décidé de lancer un premier appel à projets dédiée uniquement à l’habitat participatif, ce qui constituait alors une première en France. Tout au long du processus, la municipalité s’est considérablement inspirée d’exemples voisins comme ceux de Tübingen ou de Freiburg.