Dans le cadre de Cities4PEDs, un projet de recherche de deux ans, financé par JPI Urban Europe, nous avons organisé une série de midi-conférences sur l’énergie dans le but d’apprendre et d’approfondir des questions spécifiques et pertinentes pour étudier les aspects et les stratégies de mise en œuvre des quartiers à énergie positive (QEP). Le projet a apporté des témoignages de pratiques innovantes qui existent déjà dans toute l’Europe et a ouvert une conversation sur les défis communs possibles et les stratégies en place pour accélérer la transformation urbaine vers des QEP.
Les QEP sont des quartiers urbains qui produisent plus d’énergie renouvelable qu’ils n’en consomment. À l’heure où les villes européennes tentent de se débarrasser des combustibles fossiles, la mise en œuvre des QEP semble attrayante. Mais comment y parvenir ? Voici les leçons des villes de Bruxelles, Delft, Lille, Lyon, Stockholm, Valence et Vienne, apprises lors de ce premier cycle d’échanges.
Les communautés énergétiques peuvent donner du pouvoir aux citoyen·ne·s, favoriser la cohésion sociale et aider à (re)construire la confiance entre les citoyen·ne·s et les collectivités locales. D’après Etienne Vignali, de Lyon, le partage de l’énergie au niveau du quartier via les communautés énergétiques permet de maximiser l’autoconsommation et évite d’investir dans des technologies de stockage coûteuses, tout en sensibilisant à l’importance de l’énergie. En incluant les ménages vulnérables, comme le fait City Mine(d) à Bruxelles, les communautés énergétiques pourraient également être un moyen de soutenir une transition juste, en utilisant la question énergétique comme une réponse à des besoins et des questions locales plus larges.
Pour que les communautés énergétiques se répandent, il est essentiel de bien comprendre les différents groupes cibles et de simplifier les actions nécessaires de leur part. En outre, les actions collectives, telles que les campagnes de sensibilisation au niveau du quartier, les achats groupés et la rénovation collective, permettent également de développer davantage de communautés énergétiques, favorisant ainsi la responsabilisation et l’autonomie locales. Dans tous les cas, le soutien des collectivités locales est essentiel pour établir le cadre de collaboration des acteur·rice·s locaux·ales et gagner la confiance des citoyen·ne·s. La ville de Valence a placé les communautés énergétiques au centre de sa stratégie énergétique, visant à atteindre 100 communautés énergétiques d’ici 2030 !
Bien qu’ils nécessitent souvent un important travail de cartographie des bâtiments et des ressources existants, les instruments de planification urbaine tels que la réglementation de la production d’énergie renouvelable ou des systèmes de chauffage peuvent stimuler le développement des QEP. En effet, la définition de différentes zones dans les plans d’urbanisme permet de proposer des solutions différentes ou de fixer des exigences adaptées aux spécificités de chaque quartier. Néanmoins, la mise en place d’obligations diverses, telles que le raccordement aux systèmes de chauffage urbain ou le passage à des appareils de chauffage à base d’énergies renouvelables, doit s’accompagner d’une communication forte à l’égard des urbanistes et des citoyen·ne·s pour les guider dans ce virage décisif. Dans cette optique, la ville de Vienne a développé une plateforme de services pour guider les habitant·e·s, en répertoriant (entre autres) les entreprises de confiance avec lesquelles collaborer.
Par ailleurs, pour réaliser des QEP, une transformation du secteur de la construction est nécessaire. La municipalité de Lille l’a compris et a donc initié un processus de co-création avec les développeur·se·s et designers locaux·ales, pour constituer ensemble la base collective du Pacte bas carbone. Un autre problème est que, trop souvent, les promoteur·rice·s immobilier·e·s passent à côté des objectifs qu’ils devaient atteindre : les résultats de la consommation d’énergie des bâtiments peuvent être évalués au plus tôt un ou deux ans après que les nouveaux propriétaires vivent dans le bâtiment, et les promoteur·rice·s ne sont alors plus légalement responsables. Pour remédier à cette situation, Stockholm a mis au point un programme ambitieux et obligatoire de renforcement des capacités des promoteur·rice·s, afin de les pousser à atteindre des résultats plus élevés. Tou·te·s les promoteur·rice·s auxquel·le·s des terrains ont été vendus dans le quartier royal du port maritime sont tenus de partager leurs approches et de surveiller leurs résultats. La ville publie également les résultats des performances des bâtiments pour les encourager : le suivi des résultats et l’analyse des raisons des échecs sont essentiels pour améliorer les résultats !
La ville de Delft a, quant à elle, mis au point une série de mesures allant d’une campagne de communication continue, à l’investissement dans ses propres biens immobiliers, en passant par la subvention des entreprises et la fixation de résultats clairs pour les sociétés de logement social. Il convient de noter que si, pour les quartiers nouvellement construits, il est possible de reconnaître de nombreuses stratégies visant à transférer des ambitions élevées aux promoteur·rice·s, dans les quartiers existants, des expérimentations doivent encore être mises en œuvre pour mieux comprendre les leviers qui doivent être actionnés afin d’accélérer et de constituer différents types de systèmes de soutien à la rénovation de notre environnement bâti.
Décarboner les bâtiments, mettre en place des stratégies de transformation des quartiers et multiplier les QEP dans les villes est un marathon, qui ne pourra être réalisé que grâce à une stratégie à plusieurs volets couvrant l’engagement des citoyen·ne·s, la rénovation collective, les instruments de planification urbaine, l’activation des promoteur·rice·s immobilier·e·s et l’organisation spécifique des collectivités locales. Mais surtout, il faut des ressources humaines compétentes et nombreuses dans les administrations municipales sur le long terme pour conduire les stratégies, déclencher les projets, motiver les parties prenantes et soutenir les citoyen·ne·s.
Comme le dit Etienne Vignali de Lyon Confluence, « le plus important ce n’est pas le statut juridique et le modèle de gouvernance choisie, mais les personnes dévouées qui travaillent à la décarbonation de nos quartiers ».
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