Siège de nombreuses organisations internationales, Genève conduit une action connue et reconnue en matière d’énergie depuis les premières crises pétrolières des années 1970. La Ville de Genève a pour objectif de chauffer intégralement son patrimoine immobilier avec des énergies renouvelables à l’horizon 2050.
Les diverses hausses du prix du pétrole et sa forte variabilité, notamment durant la période 2004 – 2006, associées aux perspectives de diminution des ressources en énergies fossiles, ont mis en évidence la forte dépendance énergétique et financière de la Ville de Genève aux énergies fossiles. Déjà engagée dans une rationalisation systématique de ses consommations depuis une trentaine d’années, la Ville a décidé d’intensifier son action pour réaliser sa transition énergétique.
Dès 2006, l’adoption de la stratégie municipale «100% renouvelable en 2050» pour les besoins en chauffage de ses bâtiments communaux a clairement redéfini les orientations de sa politique énergétique. La stratégie, toujours en phase de mise en œuvre, permet de cibler les opérations de rénovation/assainissement sur les bâtiments où se concentrent les plus grands enjeux énergétiques et environnementaux. Ceci permettra d’augmenter de manière significative la performance énergétique du parc immobilier de la Ville de Genève, qui regroupe près de 800 bâtiments publics, administratifs et logements sociaux.
La Ville gère également près de 500 véhicules, les consommations d’eau des bâtiments et lieux publics, une grande partie du réseau d’évacuation des eaux usées et la totalité de l’éclairage public sur son territoire. En modifiant son parc de véhicules et par le développement de solutions de mobilité douce pour ses collaborateurs, la gestion rationnelle de l’eau et les économies d’électricité, la commune est engagée dans une démarche globale pour réduire son impact énergétique et climatique.
La Ville de Genève veut participer activement à la réalisation de la transition énergétique de son territoire. Elle s’est vu décerner le label European Energy Award Gold en 2008 pour sa démarche globale et cohérente, traduite dans sa politique énergétique et climatique.
Les objectifs de cette politique se traduisent également dans les domaines de l’urbanisme, de la mobilité et des transports, autant que dans la politique d’achats, la politique de gestion des déchets ou encore dans les actions d’information et de communication, voire même dans la promotion économique et touristique. Ils sont également pleinement intégrés à la définition des priorités en matière d’investissement et de planification.
Les premières réalisations selon la méthodologie «100% renouvelables» ont permis de mettre en évidence qu’une diminution des besoins en énergie de chauffage significative est atteignable en préservant l’équilibre financier des projets et en améliorant l’efficacité économique de l’exploitation des bâtiments. L’amélioration de l’efficacité énergétique agit également en termes sociaux, puisqu’elle permet un allègement important des charges de chauffage des locataires et une amélioration notable du confort des logements.
Pourtant, les seules démarches de rénovation ou de construction de bâtiments ne permettent pas d’atteindre rapidement des objectifs de transition énergétique du territoire. La percée des énergies renouvelables reste encore inférieure à la progression linéaire que s’est fixée la Ville de Genève. La mise en œuvre de la stratégie a également montré que de nombreuses ressources énergétiques sont potentiellement valorisables sur le territoire.
Des liens ont été établis entre les spécialistes de l’énergie et les urbanistes en charge de la planification urbaine. Ils sont aujourd’hui traduits dans la Loi cantonale sur l’énergie et son obligation d’établir des Concepts Energétiques Territoriaux (CET). Ces outils méthodologiques intègrent les enjeux énergétiques à l’échelle du quartier dès l’élaboration des projets, en favorisant des solutions renouvelables et locales.
Pour passer à une phase d’exploitation, la ressource doit être considérée à sa juste échelle territoriale, afin d’optimiser les coûts de mise en œuvre et les rendre concurrentiels avec les énergies fossiles. Le déploiement rapide et massif des solutions d’énergies renouvelables passe par une mise en commun des ressources locales et par la mise en œuvre d’infrastructures collectives de quartier pour les distribuer.
Le premier exemple concret de ce changement d’échelle est CADéco Jonction. Ce projet, mené en collaboration avec le Canton et les Services industriels de Genève (partenaire parapublic, distributeur des énergies de réseaux), permettra de chauffer une vingtaine de bâtiments importants grâce à l’eau du lac Léman dès 2019. Avec l’aboutissement de ce projet, la Ville de Genève sera en mesure de couvrir 14% de ses besoins totaux en chaleur par des énergies renouvelables et ainsi de rattraper la progression linéaire fixée. Ce projet doit également démontrer le potentiel de la ressource «eau de surface» comme alternative crédible et efficace aux énergies fossiles.
Placée au centre d’une agglomération transfrontalière de près de 1 million d’habitants, la Ville de Genève inscrit systématiquement sa politique énergétique dans une dynamique de partenariats suisses et européens. Les principaux contacts s’établissent néanmoins avec le Canton de Genève et ses principaux partenaires. Pour l’approvisionnement en bois énergie, la Ville a contribué à la création d’une nouvelle filière locale. Cette dernière s’appuie sur les ressources de la Ville à travers l’exploitation de ses propres forêts, et sur un partenariat avec l’association genevoise des propriétaires privés de forêts. Ce partenariat vise une juste rémunération de la ressource, fournie par les forêts privées, et une exploitation durable et sans frais pour les propriétaires. Elle favorise l’emploi local et un circuit économique court.
La Ville de Genève dispose d’une capacité d’action partielle à l’échelle du territoire communal, de par l’organisation genevoise de répartition des compétences entre le Canton et ses principaux partenaires publics ou parapublics (communes, Services Industriels de Genève, Transports Publics Genevois, etc.). Elle peut cependant influencer certaines décisions et faciliter le déploiement de projets d’infrastructures sur son territoire. De fait, la Ville de Genève inscrit le développement de sa politique énergétique et climatique et de son action sur le territoire communal dans une dynamique de collaborations, de partenariats et de coordinations entre les différents acteurs territoriaux, en jouant, entre autres, les rôles de ville aménageuse et incitatrice.
Les coordinateurs de la politique énergétique et climatique ont aussi veillé à renforcer les liens avec les autres projets de la ville tels que le Plan directeur communal, la Convention des Maires et l’Agenda 21.
La Ville de Genève veut porter une vision dynamique, positive et avant-gardiste en termes d’énergie et de climat afin de transformer un futur souhaitable en un objectif collectif. Cette vision a pour principe que les partenaires territoriaux et les citoyens collaborent et adhèrent aux différents objectifs fixés, dans un engagement collectif de la société civile et de tous les acteurs.
Les processus et jeux d’acteurs dans la mise en œuvre de la vision 2050 sont nouveaux et donc souvent complexes. C’est pour cela que l’identification des acteurs, leur mise en mouvement au bon moment, au bon endroit et dans le bon rôle sont les enjeux centraux d’une planification réussie et porteuse de projets innovants. Le projet CADéco Jonction a montré que le jeu d’acteurs qui permet de favoriser l’économie et les savoir-faire locaux non-délocalisables se jouent à trois niveaux: la densité des «clients» et leur adhésion au projet, les partenaires industriels locaux qui ont la capacité d’investir et d’influencer et de créer les savoir-faire locaux et des partenaires commerciaux pour diffuser le projet.