La prochaine Commission ne prendra ses fonctions que début décembre mais sa Présidente a déjà pris les manettes du dossier le plus brulant du prochain mandat : le budget 2028-2034. Ses services testent les réactions et avancent rapidement leurs pions.
Deux grandes idées devraient tenir la corde pour la refonte des dépenses : passer d’une approche par « programme » à une approche par « politique ». L’autre grande nouveauté serait de débourser le budget européen directement au niveau national, sur le modèle du Fonds de relance et de Résilience. Il s’agirait donc pour le niveau européen de fixer de grands objectifs pour ensuite négocier un grand plan national comme pour le Fonds de relance.
Qu’en est-il de l’approche territoriale ? Exit … A ce stade, il n’est pas mentionné comment les grands objectifs politiques pourront concrètement se décliner au niveau local. Alors même qu’aucune des nouvelles obligations du Green Deal ne pourront être réalisées sans une application au niveau de chaque ville. Comment mettre en œuvre l’obligation faite aux villes de plus de 45000 habitants d’avoir un plan chaleur et fraicheur sans leur en donner les moyens ? ou encore l’obligation de rénover 3% des bâtiments publics par an ?
A ce stade, les grandes politiques qui deviendraient le cœur du budget restent très sectorielles. Alors que les acteurs locaux, réunis dans la Local alliance, demandaient l’inverse : des Fonds européens qui viendraient appuyer des stratégies locales intégrées de transformation. Des « Pactes de prospérité » à l’image des ‘One Health cities’ qui donneraient une vision partagée de la ville en 2034, avec un plan d’action et un plan d’investissement. Une vision qui inclue plusieurs objectifs sectoriels : 100% d’énergies renouvelables, une nature préservée, une santé pour tous grâce à un cadre de vie sain, un accès à une alimentation de qualité, une ville résiliente prête pour les chocs climatiques à venir, économe dans l’usage des ressources. Des villes qui protègent réellement les citoyens·nes que ce soit en garantissant l’accès aux biens et services qu’en valorisant l’économie locale.
Le dernier rapport de l’Agence Européenne de l’Environnement articule bien les interactions entre le nouvel agenda politique de la Commission européenne ‘Sécurité, compétitivité et équité » et les limites planétaires. Au-delà du budget européen, le rapport pointe également la nécessaire révision de toutes les règles budgétaires et de finances publiques. Ce sont tous les instruments, aides d’Etat, règles d’endettement, marchés publics qui doivent être revus pour prendre en compte les nouveaux défis de la résilience, de l’autonomie stratégique, de la sécurité d’approvisionnement en ressources.
Ce sont donc les deux axes de travail que nous allons explorer avec l’expertise et l’expérience de nos villes membres pour inspirer et peser dans les débats sur le futur du financement public :
Auquel s’ajoute le pilier fondamental de l’action public locale, totalement oublié des discussions : toutes ces stratégies, toutes les dépenses publiques doivent être, co-produites, instruites, suivies, par …. des humains en capacité de négocier, gérer, concevoir…. or, nous observons une tendance très lourde aux coupes budgétaires des administrations sub-nationales.
Si les autorités locales et régionales n’ont pas les moyens de leurs obligations, par moyen nous entendons les compétences et les budgets nécessaires à leur mission, la fiscalité correspondante, et que l’Union Européenne ne s’assure pas que dans chaque État, les gouvernements locaux aient ces moyens, c’est tout l’édifice de l’Union qui en sera fragilisé.
Et fragile est un bien faible mot … ce sera notre troisième chantier.