Tribune de Sandra Vlašić, rédactrice pour le PNUD, juillet 2022
Le Forum urbain mondial de l’ONU-Habitat, qui s’est tenu récemment dans la ville de Katowice, en Pologne, a montré qu’il reste beaucoup à faire pour atteindre l’objectif de développement durable 11 sur les « villes et communautés durables ».
Malgré de nombreux engagements politiques à l’échelle internationale et régionale, comme le Programme 2030 et le pacte vert pour l’Europe (ce dernier comptant deux missions visant à créer des villes durables, résilientes et climatiquement neutres), nous restons en retard sur le calendrier. « Les défis complexes auxquels notre communauté fait face ne peuvent pas être résolus uniquement par des solutions techniques », explique la ville arménienne de Charentsavan. Une phrase qui traduit bien la nature des problèmes auxquels les villes sont confrontées.
Les villes sont des écosystèmes complexes dans un monde complexe où des choses inimaginables se déroulent. En présentant le pacte vert pour l’Europe, la Présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a comparé les missions de l’Union européenne aux premiers pas sur la Lune. Et en effet, la foule d’événements sans précédent qui nous ont touchés nous a donné le sentiment de nous retrouver dans une partie inexplorée de l’espace : pandémie de COVID-19 et confinements, inondations estivales en Allemagne, tornades en Europe centrale, records de chaleur, sécheresses et feux dans la région Méditerranéenne, guerre en Ukraine, hausse des prix du carburant, crises économiques… Je pourrais continuer longtemps. Nous devons à la fois faire face au présent et penser à l’avenir.Les missions doivent se poursuivre et nous devons adopter une nouvelle méthode, car les approches linéaires par projet ne fonctionnent plus.
112 villes européennes se sont engagées dans une mission en vue d’atteindre la neutralité carbone avant 2030, et pas très loin, chez nos voisins de l’est, un nombre trois fois plus élevé de villes et de municipalités ont entamé une mission similaire appelée Mayors for Economic Growth (Les maires pour le développement économique), ou dans sa version courte, #M4EG.
« M4EG est une initiative conjointe de l’UE et du PNUD en matière de recherche et de développement qui vise à dépasser le schéma traditionnel donateur-bénéficiaire », explique Tina M. S. Stoum, cheffe de projet régionale pour Mayors for Economic Growth. « Elle est fondée sur un constat douloureux : la majorité des projets de développement entraînent des changements progressifs plutôt que les transformations radicales dont nos sociétés ont désespérément besoin. Cette initiative nous servira d’environnement de test pour essayer de nouveaux outils et de nouvelles approches. Cette nouvelle proposition de valeur repose sur des « portefeuilles », une alternative à l’approche standard compartimentée par projet utilisée partout. »
M4EG n’est pas un projet traditionnel, c’est une invitation au changement. Les problèmes complexes exigent des réponses systémiques. Mariela Atanassova,spécialiste en innovation stratégique et chargée des villes pour la Chôra Foundation, explique pourquoi nous avons besoin d’une approche mixte de ce type : « L’idée est que nous faisons face à des systèmes complexes qui ne peuvent pas être changés en élaborant un plan parfait et en l’exécutant, car les systèmes ont des réactions imprévisibles. Il faut adopter des outils qui permettent d’identifier les transformations nécessaires. »
C’est ce que fait M4EG, et l’initiative devient peu à peu une plateforme qui soutient les villes et les municipalités des pays du Partenariat oriental dans leur transition écologique, inclusive et numérique, et leur développement économique local 2.0.
Actuellement, plus de 350 municipalités locales en Arménie, en Azerbaïdjan, en Moldavie, en Géorgie et en Ukraine ont rejoint ce programme afin de réinventer l’avenir des villes et de les rendre durables. En 2021, M4EG a entamé la deuxième phase de ses activités, qui s’inscrit dans la continuité de la phase précédente (2017-2020). L’initiative pourra-t-elle devenir une grande plateforme collaborative pour les villes sélectionnées et servir à toutes les villes de l’UE ainsi qu’à celles des pays voisins ?
Tina Stoum explique : « En travaillant directement avec les municipalités, nous nous intégrons au contexte local, voire hyperlocal, afin d’identifier ensemble des axes de transformations adaptés à l’écosystème de la ville ou de la municipalité, puis de les mettre en œuvre. C’est un travail ambitieux qui nous invite à sortir de notre zone de confort : nous ne sommes plus des fournisseurs de solutions, mais des apprenants. Cela suppose aussi de passer d’un schéma interdisciplinaire à un schéma multidisciplinaire, car les problèmes complexes, comme la transition vers les énergies renouvelables, les inégalités et la confiance dans les autorités locales, vont souvent de pair. »
Les villes de M4EG ont plusieurs outils à leur disposition, à savoir un ensemble de dispositifs de financement, d’apprentissage de la facilitation, de mentorat, de prise de contact et de création d’une communauté et pour finir, un espace pédagogique spécial. En tout, 13 villes ont été sélectionnées dans le cadre de l’appel à candidatures européen pour les appels de portefeuilles annuels, 18 villes font partie du programme « Urban Imaginaries » et 9 autres ont été retenues pour le programme « Portfolio Journey » (d’une durée de 2 ans et plus). Et ce n’est que le début. Dernier élément mais non des moindres, M4EG s’adapte afin d’appuyer les villes ukrainiennes et moldaves en première ligne des actions de réponse, de redressement et de renouvellement face à la crise.
La ville arménienne d’Areni étudie comment développer le tourisme durable, mettre en place et préserver un environnement écoresponsable pour les résidents, et comment l’utiliser comme levier de développement permettant d’attirer les financements pour le renouvellement des infrastructures. La ville de Batoumi, en Géorgie, rêve d’un écosystème de start-ups solide qui contribuera à transformer le marché du travail local afin d’oublier les anciens secteurs et de se concentrer sur les technologies et sur des compétences plus poussées. Ceadîr-Lunga, en Moldavie, imagine un système énergétique résilient où l’énergie est abordable et provient de sources renouvelables. Une autre ville géorgienne, Koutaïssi, souhaite devenir une ville écologique et intelligente à l’empreinte carbone neutre, utiliser les ressources naturelles durablement, développer l’économie circulaire, et investir dans des espaces verts publics et l’alimentation locale. Ces descriptions s’appliquent facilement à toutes les villes européennes. C’est pourquoi il est évidemment pertinent de leur permettre d’entrer en contact à travers un réseau international de leaders urbains sur la plateforme M4EG, afin que chaque ville puisse apprendre des autres.
Personne ne peut aller loin seul, mais ensemble, nous pouvons atteindre nos objectifs. Cette mission rassemble des maires de plus de 350 municipalités locales de 5 pays, avec l’appui de la direction générale du voisinage et des négociations d’élargissement (DG-NEAR) et du PNUD. Les « partenaires compétents » sont des experts ou des pionniers expérimentés : Ove Arup, une entreprise d’ingénierie internationale de premier plan spécialiste du développement durable, qui crée des structures et des villes meilleures qui rendent les gens heureux ; EIT Climate-KIC, la plus grande communauté européenne d’innovation et de connaissances pour le climat, à la tête de la mission de l’UE pour des villes climatiquement neutres ; l’Université de technologie de Tallinn, ou TalTech, le fleuron de l’ingénierie et de l’enseignement technologique estoniens, également un centre de recherche ; le Centre for Public Impact, ou CPI, un partenaire d’apprentissage pour les gouvernements, les fonctionnaires et le réseau d’acteurs du changement, qui vise à repenser la gouvernance de sorte qu’elle convienne à toutes et tous ; et la CHÔRA Foundation, dont l’objectif est d’aider les personnes et les organisations à faire face à un monde de plus en plus complexe via une innovation stratégique et transformatrice.
Pas besoin d’aller sur la Lune pour créer la ville que nous voulons. Les solutions, les connaissances et les ressources se trouvent dans nos communautés. La ville que nous voulons est un endroit agréable à vivre, durable, inclusif, sûr et sain, où tout le monde a un travail ou une source de revenus décente, le soutien nécessaire et un accès aux services de base. C’est un espace convivial fait pour les êtres humains, où vivre en harmonie avec la nature. Ensemble, faisons du monde un endroit plus agréable !
Rejoignez-nous lors de l’événement « M4EG Show & Tell » qui aura lieu en ligne le 28 juillet et découvrez en avant-première les nouvelles pistes de transformation urbaine : de la gestion des déchets à la restauration des lieux culturels, rencontrez le réseau M4EG et explorez les approches pilotes menées par des équipes municipales locales.
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