Le Hub « Villes et bâtiments sans énergies fossiles » d’Energy Cities vise à rendre le parc immobilier et les quartiers des villes plus efficaces et sobres en carbone.
Revenons sur les discussions passionnantes qui ont eu lieu au Forum 2022 d’Energy Cities à Bruxelles à propos de la nécessaire décarbonation des bâtiments !
De nombreux intervenants ont partagé leurs expériences et leur expertise sur cette question technique des bâtiments. Le forum a été une excellente occasion d’établir un dialogue entre les différents niveaux d’action politique, ainsi qu’avec des experts techniques. Tout d’abord, pour une meilleure compréhension technique du sujet, l’autrice principal du GIEC, Yamina Saheb, a présenté le cadre « SER » que nous devons suivre afin de décarboner notre parc immobilier.
Le rapport du GIEC est sans appel : décarboner les bâtiments d’ici 2050 est possible si nous injectons de la sobriété, de l’efficacité énergétique et du renouvelable dans le parc.
Yamina Saheb, autrice principal, WG III, Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat et auteur principal du chapitre sur les bâtiments du GIEC AR 6, [traduit par Energy Cities]
Le cadre des bâtiments sans énergie fossile est clair : S pour sobriété, E pour efficacité et R pour renouvelables.
La « sobriété » est, selon la définition du GIEC, « un ensemble de mesures politiques et de pratiques quotidiennes qui permettent d’éviter la demande d’énergie, de matériaux, de terrains et d’eau, tout en assurant le bien-être humain pour tous dans les limites planétaires ». La sobriété est un levier vraiment puissant pour réduire les émissions de GES non seulement dans les bâtiments, mais aussi de manière plus générale. Elle repose sur un changement systémique de nos modes de vie et de la façon dont nous consommons et utilisons l’énergie.
« L’efficacité » consiste à améliorer l’intensité énergétique des bâtiments, c’est-à-dire à utiliser moins d’énergie à surface égale dans un bâtiment. Ce résultat est obtenu en modernisant les bâtiments existants, en construisant de nouveaux bâtiments à faible consommation carbone ou en remplaçant les systèmes de chauffage et de refroidissement à base de combustibles fossiles.
Enfin, les « renouvelables » font référence aux énergies renouvelables, dont la proportion doit augmenter dans la consommation énergétique des bâtiments, compte tenu de leur faible empreinte carbone.
Ce cadre SER doit guider l’action climatique et politique dans le domaine des bâtiments. Maintenant que ce cadre a été présenté, il faut voir comment il se traduit sur le terrain.
Seulement 40% de nos maisons avaient des mesures d’efficacité énergétique de base, nous devons offrir une solution rapide et efficace à ces ménages !
Tine Heyse, maire adjointe, ville de Gand (Belgique) [traduit par Energy Cities]
Les acteurs locaux tels que les agences de l’énergie, les municipalités et les gouvernements locaux élaborent une série de politiques différentes afin de parvenir à des bâtiments sans énergie fossile. Par exemple, la ville de Gand en Belgique a créé un « Energie Centraal » qui est une agence locale de l’énergie dédiée à la décarbonation des bâtiments. Elle aide les citoyens à améliorer leur efficacité énergétique en leur apportant un soutien technique, en les accompagnant dans la conception de leur plan de rénovation, en leur proposant des taux d’intérêt bas pour les prêts énergétiques, et même en leur suggérant les meilleurs artisans pour s’occuper de la rénovation. Centraliser les activités pour que les citoyens n’aient qu’un seul endroit où s’adresser est un bon moyen de les inciter à rénover leur maison, en rendant la tâche moins coûteuse et moins compliquée.
Une autre solution apportée par la ville française de Dijon est la priorité donnée aux rénovations. Comme les rénovations sont un processus long, Dijon essaie de se concentrer sur ses bâtiments HLM des années 1970, afin de protéger les plus exposés à la pauvreté énergétique tout en gagnant en efficacité carbone, bien plus que si elle rénovait des bâtiments plus récents.
Les villes ont besoin de deux choses pour leurs bâtiments : de l’argent et de la législation !
Karlis Goldstein, membre du cabinet du commissaire à l’énergie Simson [traduit par Energy Cities]
Au niveau européen, deux choses sont nécessaires pour parvenir à des bâtiments sans énergies fossiles. La première est le financement. La rénovation des bâtiments anciens coûte cher, surtout dans les villes européennes où de nombreux bâtiments sont classés. Les investissements massifs seraient plus efficaces s’ils étaient réalisés à une échelle plus large que la seule échelle nationale – sans compter que tous les pays n’appliqueraient pas la même politique de manière uniforme. Afin d’avoir un financement efficace, les intervenants ont souligné qu’il fallait industrialiser la rénovation, réaliser des économie d’échelle.
En outre, le deuxième besoin est celui de la législation, nécessaire pour faire respecter l’obligation de rénover, surtout au niveau du secteur privé. Quelques pays de l’UE ont déjà mis en place des lois qui imposent ce type de mesures, mais là encore, la puissance de feu législative de l’UE est nécessaire pour parvenir à une action uniforme et, en fin de compte, à des bâtiments sans énergie fossile.