« Facture élevée » : on pourrait l’écrire au pluriel bien sûr, vu toutes ces factures impayables d’énergie pour chaque foyer à travers l’Europe, chaque petit commerce, chaque entreprise, chaque collectivité locale. Avec quelques exceptions toutefois : les familles qui vivent dans des maisons passives, les entreprises qui sont branchées à un système de chauffage urbain de récupération, les commerces qui génèrent eux-mêmes leur électricité et bénéficient d’autoconsommation, les collectivités locales dont l’entreprise municipale produit autant qu’elle commercialise d’énergies renouvelables…
Elle est d’autant plus astronomique que l’énergie vient de sources fossiles (et fissiles bien sûr) « extraterritoriales », que les besoins n’ont pas été repensés ni vraiment réduits, que le système énergétique est toujours largement centralisé. On nous dira qu’il est simpliste de mettre en cause les réformes européennes de libéralisation des marchés de gaz et d’électricité. On nous rétorquera qu’elles ont apporté beaucoup, que sans elles il n’y aurait pas de production de renouvelables… Peut-être. Cela ne signifie pas pour autant que ces politiques restent adéquates. Aujourd’hui, ces mêmes règles ne permettent pas aux marchés de remplir les objectifs sociétaux minimum (sécurité d’approvisionnement, coûts abordables, système basé sur la solidarité, zéro énergie fossile ou fissile).
Comme l’explique Eckart Würzner, maire de la ville allemande d’Heidelberg et Président d’Energy Cities, l’entreprise municipale d’énergie s’associe avec les villes de la province pour investir dans l’éolien et massifier leur production d’électricité. Et de (re)gagner le contrôle de la production, de planifier localement, de s’associer régionalement.
Nous pouvons tirer plusieurs enseignements de la crise des prix de l’énergie que traverse l’Europe et dessiner de nouvelles règles d’or pour le continent :
Voilà, 2023 doit tourner la page des politiques européennes énergétiques telles que conçues depuis le début de la libéralisation de ce secteur, dans les années 1990 et 2000. Les précédentes réformes ont provoqué un véritable big-bang, elles ont tout redessiné.
Pour combattre le changement climatique, rendre le système résilient, assurer une sécurité d’approvisionnement et d’accès à l’énergie dans un monde radicalement changé, ce n’est pas de quelques ajustements cosmétiques dont nous avons besoin.
Il ne faut pas moins qu’un nouveau big-bang !