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Date de publication

15 décembre 2022

« Facture élevée » : on pourrait l’écrire au pluriel bien sûr, vu toutes ces factures impayables d’énergie pour chaque foyer à travers l’Europe, chaque petit commerce, chaque entreprise, chaque collectivité locale.  Avec quelques exceptions toutefois : les familles qui vivent dans des maisons passives, les entreprises qui sont branchées à un système de chauffage urbain de récupération, les commerces qui génèrent eux-mêmes leur électricité et bénéficient d’autoconsommation, les collectivités locales dont l’entreprise municipale produit autant qu’elle commercialise d’énergies renouvelables…

La facture est salée, donc !

Elle est d’autant plus astronomique que l’énergie vient de sources fossiles (et fissiles bien sûr) « extraterritoriales », que les besoins n’ont pas été repensés ni vraiment réduits, que le système énergétique est toujours largement centralisé. On nous dira qu’il est simpliste de mettre en cause les réformes européennes de libéralisation des marchés de gaz et d’électricité. On nous rétorquera qu’elles ont apporté beaucoup, que sans elles il n’y aurait pas de production de renouvelables… Peut-être. Cela ne signifie pas pour autant que ces politiques restent adéquates. Aujourd’hui, ces mêmes règles ne permettent pas aux marchés de remplir les objectifs sociétaux minimum (sécurité d’approvisionnement, coûts abordables, système basé sur la solidarité, zéro énergie fossile ou fissile).

Et pourtant, est-ce vraiment si compliqué ?

Comme l’explique Eckart Würzner, maire de la ville allemande d’Heidelberg et Président d’Energy Cities, l’entreprise municipale d’énergie s’associe avec les villes de la province pour investir dans l’éolien et massifier leur production d’électricité.  Et de (re)gagner le contrôle de la production, de planifier localement, de s’associer régionalement.

Nous pouvons tirer plusieurs enseignements de la crise des prix de l’énergie que traverse l’Europe et dessiner de nouvelles règles d’or pour le continent :

  • Vendre ce que l’on produit est source de stabilité : combien d’entreprises de commercialisation ont fait faillite cette année, prises en tenaille entre les contrats passés et la volatilité des prix de marché ? Avec pour résultat une concentration sans précédent des fournisseurs !
  • La diversité des mix énergétiques locaux impose une décentralisation des décisions,
  • Et avant cela, une connaissance fine des opportunités et des risques du territoire en matière de production et de consommation énergétique
  • L’énergie, tout comme l’alimentation, ou encore le logement, ne sont pas des biens que l’on peut commercialiser sans mettre en péril la démocratie. Aucun avantage à cette spéculation sur ces marchés n’a pu être observé à ce jour. (Qualité ? Prix ? Externalités positives ?)

Ajustements cosmétiques ou réformes profondes ?

Voilà, 2023 doit tourner la page des politiques européennes énergétiques telles que conçues depuis le début de la libéralisation de ce secteur, dans les années 1990 et 2000. Les précédentes réformes ont provoqué un véritable big-bang, elles ont tout redessiné.

Pour combattre le changement climatique, rendre le système résilient, assurer une sécurité d’approvisionnement et d’accès à l’énergie dans un monde radicalement changé, ce n’est pas de quelques ajustements cosmétiques dont nous avons besoin.

Il ne faut pas moins qu’un nouveau big-bang !