La Rochelle est une ville touristique sur la côte atlantique française qui vise à devenir une ville lente, ce qui signifie que 80 % des rues auront une vitesse limitée à 30 km/h dans les années à venir. Les Rues Vivantes offrent la possibilité d’expérimenter, de tester la vie sans voiture et d’imaginer une utilisation différente de l’espace public. Avec cette initiative, La Rochelle utilise le vélo comme outil principal, non seulement considéré comme un moyen de transport, mais aussi comme facteur de changement de comportement volontaire

Augmenter les déplacements du domicile à l’école et de l’école au domicile à pied et à vélo : la Rue des Enfants

L’école Pierre Loti est située dans une zone aux niveaux sociaux variés au sein d’un petit quartier. Un parc attrayant est situé en face de l’école, mais l’avenue Pierre Loti, qui abrite 8 000 véhicules par jour, sépare cet espace vert de l’école. Les parents ont peur de laisser leurs enfants aller à vélo ou à pied à l’école et pensent que les voitures sont la solution la plus sûre pour les y emmener. De plus, beaucoup d’écoliers ne savent pas faire du vélo. Pour ces raisons, le département de l’environnement urbain et de la sécurité a contacté l’école pour voir si, ensemble, ils pourraient transformer cette route très fréquentée en une rue sans voiture pendant une journée. Cela a permis aux enfants de jouer dans la rue et dans le parc et de s’amuser tout en apprenant à faire du vélo. La rue en face de l’école a été fermée durant une journée en juin 2016 et mai 2017.

Les activités organisées étaient les suivantes : accompagnement des enfants à l’école en vélo (organisé par la police à vélo et par l’école de vélo) et à pied (organisé par les parents), un magasin de prêt de vélos et de jeux, un parcours d’entraînement pour apprendre faire du vélo, des ateliers et informations pour apprendre à réparer les vélos, la sécurité à vélo, l’utilisation des transports en commun, l’essai gratuit de différents vélos cargo dans des magasins de vélos.

Cette initiative a permis la création d’une aire de jeux dans le parc à côté de l’école et des places de stationnement pour vélos. Elle a également encouragé les échanges intergénérationnels entre l’école et la maison de retraite voisine. Des parents ont créé une pétition pour aménager des potagers urbains collectifs dans le parc. Il a été décidé que la municipalité consacrerait 60 000 euros à la construction du potager, qui serait ouvert à tous les habitants du quartier, y compris à la maison de retraite. En outre, les magasins de vélos ont augmenté leurs revenus et vendent davantage de vélos, y compris des vélos pliables et des vélos cargo. Les représentants élus, les enseignants et les parents réfléchissent maintenant à la manière d’inclure l’apprentissage du vélo dans le programme scolaire.

L’initiative La Rue des Enfants est accompagnée de plusieurs activités. Suite aux deux événements d’une journée organisée par la municipalité, l’école et les parents ont organisé eux-mêmes un troisième événement en avril 2018, comprenant un marché du vélo et une fête de rue, avec la participation des associations. La municipalité a initié le processus et maintenant les parents, les enfants et les enseignants sont responsables de l’organisation de tels événements dans le futur, la municipalité offrant un soutien, mais n’agissant plus comme un moteur. En outre, d’autres écoles sont intéressées par cette initiative et une nouvelle Rue des Enfants avec une autre école sera organisée dans un quartier différent.

Développer l’attractivité des zones commerciales en centre-ville

La première expérience a eu lieu sur la place du marché de juillet à août 2016. Cet endroit est aujourd’hui utilisé comme un rond-point pour les voitures, réduisant l’espace disponible pour les piétons. Les commerçants souhaitent réduire la présence de voitures, mais autorisent quand même l’accès au marché le matin. Une rampe d’accès modulaire était donc nécessaire. Une solution a été trouvée pour réguler l’accès, en utilisant des panneaux de signalisation colorés pour marquer les limites de la zone piétonne pendant l’événement.

De juillet à août 2017, la deuxième expérience a été menée dans le quartier Saint-Nicolas, une petite zone commerciale légèrement cachée derrière le vieux port. L’objectif était de rendre ce quartier repérable de loin et d’y attirer plus de monde. Tous les magasins sont de petits commerces locaux et les commerçants ont du mal à attirer plus de clients dans le centre-ville à cause de la concurrence des grandes zones commerciales situées en dehors du centre-ville. Des affiches présentant les propriétaires de magasins ont été imprimées par la municipalité à l’aide de l’outil d’affichage ENGAGE (wwww.citiesengage.eu). Les commerçants pouvaient promouvoir le cyclisme sur ces affiches qui étaient exposées dans leurs magasins. Une exposition des affiches ENGAGE a également été organisée par la municipalité, y compris des affiches avec des étudiants, des enseignants et des fonctionnaires mettant en avant leurs différents arguments en faveur du déplacement à vélo.

Le principal résultat découlant de ces expériences est le changement de mentalité des commerçants qui ne clament plus « pas de voiture, pas de ventes ». De plus en plus de gens font du shopping à vélo, car les citoyens se sont rendu compte que le vélo cargo était plus rapide que la voiture. Cela montre qu’il est important que les gens changent de comportement de manière volontaire, mais pour cela, il est essentiel qu’ils essaient et expérimentent le vélo au préalable, afin qu’ils réalisent les avantages de ce nouveau mode de vie. Les commerçants prennent le vélo pour acheter leurs produits et jeter leurs poubelles. Les magasins de vélos et les commerçants ont constaté une augmentation de leur chiffre d’affaires au cours de cette phase test, certains d’entre eux ayant même profité d’une augmentation allant jusqu’à 25 %. L’association des commerçants, rassemblant près de 100 membres, réfléchit maintenant à la manière d’encourager le shopping à vélo et à pieds pour rendre ce mode de vie attrayant pour ses clients potentiels, et se différencier alors des grands centres commerciaux en périphérie de la ville qui ne sont accessibles qu’en voiture. Le projet a également rendu la population plus sociable. Par exemple, les propriétaires de magasins installent des chaises à l’extérieur de leurs magasins afin d’inviter les passants à s’asseoir et à apprécier l’excellente qualité de vie de leur ville.

Les Rues Vivantes : une expérience modulaire pour la ville de La Rochelle

Vivre dans un environnement urbain conçu autour de la voiture complique pour les habitants la tâche d’imaginer les réaménagements possibles des espaces publics de leur ville. La municipalité de La Rochelle a mis en place le projet Rues Vivantes en en faisant une expérience motivante et modulaire permettant aux citoyens d’expérimenter différents aspects de leur quotidien sans voiture, et de constater tous ses avantages. Cependant, avec cette expérience, la municipalité de La Rochelle ne vise pas par exemple à calquer la même rue d’enfants dans toutes les écoles, mais souhaite créer pour chaque école un nouveau concept basé sur les besoins des différents quartiers. Chaque rue est différente et la municipalité vise à maintenir le processus de co-construction qui s’est mise en place dans la première rue des enfants. Les Rues Vivantes ont permis de semer les graines du futur, de fournir du temps et de l’espace pour une expérience concrète et de laisser les choses se produire.