Comment créer des hubs d’innovation et d’entrepreneuriat locaux

De nos jours, de nombreuses villes sont confrontées à un abandon et/ou à une négligence de leurs quartiers historiques, en raison d’un manque d’opportunités financières et de services. D’autres font face à la perte de leur identité culturelle et de leurs traditions à cause du tourisme de masse ou de la gentrification. Un groupe de villes européennes teste actuellement une nouvelle approche pour régénérer ces quartiers, en utilisant le patrimoine culturel comme levier pour l’innovation et l’entrepreneuriat.

Au cours des deux dernières années, avec d’autres partenaires du projet HUB-IN financé par l’UE, Energy Cities a aidé les villes d’Angoulême (France), Belfast (Royaume-Uni – Irlande du Nord), Brasov (Roumanie), Gênes (Italie), Lisbonne (Portugal), Nicosie (Chypre), Slovenska Bistrica (Slovénie) et Utrecht (Pays-Bas) à définir une nouvelle vision pour leurs quartiers historiques respectifs, ainsi qu’à élaborer une feuille de route pour y parvenir, en misant sur le patrimoine matériel et immatériel local. Ces feuilles de route viennent d’être publiées et guideront les villes dans l’élaboration d’actions concrètes pour transformer leurs quartiers historiques en hubs d’innovation et d’entrepreneuriat !

Définir les valeurs et missions principales dans le cadre d’une collaboration avec d’autres acteurs locaux

Chacun de ces quartiers urbains historiques possède ses forces, ses atouts, et présente ses propres défis. Nous avons accompagné ces villes dans la mise en place d’un processus participatif afin de définir un ensemble de valeurs pour guider leurs actions, une vision et des missions concrètes, avec un groupe d’acteurs locaux actifs dans ces zones spécifiques. Il s’agissait également de mettre la durabilité, l’inclusivité et les principes d’économie circulaire et sociale au cœur de ces actions. Le processus comprenait, entre autres, des ateliers, des entretiens, des études ethnographiques et des enquêtes auprès des citoyens. Les équipes de HUB-IN ont aussi impliqué d’autres services et initiatives des villes, en invitant leurs collègues à participer aux activités, premiers pas essentiels vers l’autonomisation de la communauté et l’entrepreneuriat. Elles réunissaient des parties prenantes locales, des citoyens, des start-ups, des universités et des centres de recherche, le secteur industriel et les autorités locales.

À Gênes, par exemple, la zone pilote comprend les principales rues culturelles et commerciales de la partie ouest de la vieille ville. Cette zone, très proche du vieux port, se caractérise par un fort mélange culturel et ethnique. Par ailleurs, elle a souffert de la disparition progressive d’activités économiques et sociales de qualité. Les parties prenantes locales ont été invitées à partager leurs points de vue et leurs idées quant à la manière de régénérer une partie du centre historique, dont différentes rues qui mènent au vieux port, tout en gardant le caractère du lieu intact, par l’innovation et l’entrepreneuriat. Elles ont proposé de nombreuses idées et ont convenu que les actions sur le centre devraient toujours s’inscrire dans une démarche d’inclusion, d’échange, de partage, avec l’ambition de créer une expérience « pour tous les sens ».

La mairie de Belfast se concentre sur la régénération du front de mer. Le Maritime Mile doit devenir « une destination patrimoniale dynamique et accessible pour les générations actuelles et futures », un lieu où « les créatifs apportent leurs perspectives uniques en vue de la préservation et de la mise en valeur du Maritime Mile par l’innovation ». La mission principale du hub de Belfast consiste à « transformer le front de mer de la ville en une destination dynamique, revitalisée, qui mise sur l’humain, accueillant des entrepreneurs innovants et créatifs, où la communauté peut s’épanouir ».

Nicosie se concentre sur sa ville fortifiée, le centre-ville historique cerné de murailles vénitiennes qui datent de 1567. Ce quartier regorge d’art, de culture et d’architecture, et accueille un écosystème de start-ups en pleine expansion, avec des incubateurs, des accélérateurs et des centres d’innovation. Dans ce contexte, le hub local entend devenir un centre d’innovation et d’entrepreneuriat florissant. Il s’agit de mettre en relation différentes initiatives dans la région et de les intégrer dans une stratégie municipale locale afin de stimuler la culture, la durabilité et l’innovation.

Une nouvelle marque pour les quartiers pilotes

Nous avons également aidé certaines des villes à définir une image de marque pour leur zone de prédilection. Par exemple, l’équipe de Slovenska Bistrica souhaitait que son hub « instille un sentiment de fierté et d’appartenance auprès des résidents et attire les touristes et les entreprises dans le centre-ville ». Le quartier correspondant à un petit centre-ville doté de nombreuses attractions touristiques et jouissant d’une atmosphère informelle et familiale, l’équipe municipale en a défini la marque ainsi : « Chaleur, beauté, et opportunités, à portée de main. » Le quartier historique accueille aussi bien des touristes que des résidents. L’atmosphère de petite ville et la gentillesse des habitants font que chacun se sent à l’aise, libre de découvrir tout ce qu’elle a à offrir (parmi son patrimoine culturel et naturel) à son propre rythme et d’y revenir.

La municipalité de Brasov se veut un pôle de durabilité en Roumanie. En outre, la ville accorde une grande importance à l’authenticité et à la préservation de sa culture locale. Elle a décidé de représenter ces valeurs sous la forme d’une porte verte ouvrant sur de belles aventures. L’image de la porte était traditionnellement utilisée par la ville, souvent désignée comme la porte de la région de Transylvanie : « La couleur verte reflète l’importance de la durabilité, mais aussi l’idée de mouvement, d’équilibre et de nature. La porte est destinée à être ouverte par tous, à être explorée et à saisir les opportunités de collaboration, d’innovation et de loisirs ».

Surmonter les défis

Les défis n’ont pas manqué au cours de ce processus. Au-delà de la complexité de travailler avec d’autres services municipaux ayant des priorités différentes et de garantir la participation des acteurs des zones historiques, chaque ville a dû surmonter des obstacles particuliers. Par exemple, la zone pilote de Lisbonne, la colline du Château, comprend deux quartiers distincts, chacun possédant ses propres caractéristiques. La ville est parvenue à identifier des questions communes à traiter dans le cadre de la feuille de route ainsi qu’un objectif partagé : « lutter contre la désertification des quartiers et conserver leur authenticité et leur identité, en protégeant et en valorisant leur patrimoine matériel et immatériel ».

À Angoulême, le principal défi a été d’identifier la zone elle-même et de définir la bonne marche à suivre. Il a finalement été décidé de régénérer la zone de la Charente, un fleuve qui traverse les zones urbaines et rurales de l’agglomération du Grand Angoulême. Les activités devraient inclure le développement de sentiers urbains thématiques qui seront utilisés comme banc d’essai par le secteur créatif local pour mettre en valeur le patrimoine naturel et culturel, matériel et immatériel et faire revenir les touristes et les habitants dans la région. La feuille de route du Grand Angoulême sera publiée dans un second temps.

À Utrecht, les autorités locales transforment la zone industrielle de Werkspoorkwartier en un quartier culturel et créatif. Une étape de cette transformation consistait à développer De Machinerie, un pôle dynamique, créatif et neutre pour le climat, dédié au cinéma et à la culture visuelle dans la zone. La feuille de route d’Utrecht a été finalisée en août 2022, mais la municipalité a dû suspendre sa mise en œuvre. En octobre 2022, les parties concernées ont décidé que le développement de la Machinerie n’était ni réaliste ni responsable au vu des circonstances actuelles. Le secteur culturel néerlandais ne s’est pas encore remis de l’impact du Covid. De plus, la crise actuelle des prix de l’énergie et la hausse des coûts de construction ont rendu difficile la poursuite du projet.

Découvrez les feuilles de route

Les résultats de ces projets sont désormais inclus dans les feuilles de route individuelles définies pour chacune des zones urbaines historiques pilotes. Retrouvez-les sur le site Web du projet HUB-IN. Les villes travaillent actuellement sur leurs plans d’action, afin de faire de leur vision une réalité !