Comment tirer au mieux parti des systèmes énergétiques basés sur les énergies renouvelables locales ?

Quels changements apporter à la Directive sur les énergies renouvelables à l’occasion de sa révision


À propos

Auteur

Alix Bolle

Date de publication

24 janvier 2022

En tant que professionnelle du climat, j’ai tendance à ne pas évoquer les sujets liés à mon travail dans la sphère privée et en parle en fait assez peu avec ma famille ou avec mes ami·e·s. Mais ces derniers mois, le prix de l’énergie ainsi que la sortie (toujours) possible du nucléaire ont largement alimenté les discussions à Bruxelles.

Il n’est donc pas rare que dans les soirées, du fait de mon étiquette « écolo », on vienne me voir pour me poser l’inévitable question : «  d’accord mais qu’est-ce qu’on fait si on renonce au nucléaire ? Manifestement pour vous le gaz ne vaut guère mieux. Alors c’est quoi votre solution ? ».

Je suis frappée de voir à quel point nous avons été habitué·e·s à penser en termes simplistes, avec des solutions toutes faites, comme s’il suffisait de remplacer une source d’énergie par une autre, d’un simple claquement de doigt. C’est le même raisonnement étriqué qui conduit à penser que l’intermittence des énergies renouvelables ne peut être résolue qu’en utilisant les énergies fossiles comme énergies d’appoint.

Face aux pressions exercées à l’échelle européenne en faveur de solutions centralisées (comme le nucléaire à petite échelle en France ou l’hydrogène ailleurs en Europe), il est très important de montrer que les réponses sont beaucoup plus complexes et contextuelles que ce que les lobbies voudraient nous faire croire. Au lieu de nous concentrer sur des technologies futuristes et non éprouvées, nous devrions commencer par exploiter ce qui est déjà disponible localement, en ayant à l’esprit que les solutions différeront d’une ville à l’autre, voire d’un quartier à l’autre. En résumé, il nous faut d’abord cueillir les fruits qui sont à portée de notre main.

C’est ce que Energy Cities et REScoop.eu proposent de faire dans notre prise de position commune en introduisant une obligation de cartographie et de planification des sources d’énergies renouvelables locales à l’occasion de la révision de la Directive sur les énergies renouvelables.

De plus en plus de collectivités locales développent des outils sophistiqués afin de cartographier leur potentiel local en matière d’énergies renouvelables. Mais il s’agit souvent de démarches volontaires développées uniquement à des fins ou pour des sources d’énergie spécifiques, à l’instar des cartes de chaleur ou des atlas solaires.

En matière de planification, certains pays de l’UE imposent aux villes d’adopter des plans énergie et climat à partir d’un certain seuil de population, mais bien souvent, il s’agit davantage d’un outil de décarbonisation que d’un moyen d’identifier ou de créer de nouvelles chaînes d’approvisionnement et de valeur énergétiques. Ce que nous proposons à l’occasion de la révision de la directive, c’est que la cartographie et la planification des énergies renouvelables deviennent une obligation pour certaines collectivités territoriales et reçoivent un soutien adéquat de la part des États membres.

Nous constatons déjà une tendance dans certaines des législations proposées dans le cadre de l’« Ajustement à l’objectif 55 » à rendre la planification locale obligatoire dans certains domaines. Ainsi, la nouvelle version de l’article 23 de la Directive relative à l’efficacité énergétique stipule que les villes de plus de 50 000 habitants doivent élaborer des plans en matière de chauffage et que les États membres doivent les soutenir dans ce processus « dans toute la mesure du possible ». Dans le cadre du paquet « mobilité » récemment proposé, la Commission souhaite également rendre obligatoire l’adoption de plans de mobilité urbaine durable par les villes à partir d’une certaine taille.

L’ « ajustement à l’objectif 55 », mais également le développement et l’inclusion sociale, imposent en effet que la Directive sur les énergies renouvelables s’inscrive dans cette tendance, où obligation va de pair avec soutien national de grande ampleur.