Il est temps de rester ferme et de désinvestir des énergies fossiles

La coalition Fossil Free EIB demande au président de la BEI de renforcer la volonté de la banque de désinvester des énergies fossiles


À propos

Date de publication

07/10/2019

Domaine législatif lié

EU Lending Policy

Energy Cities a co-signé une lettre ouverte de la coalition Fossil Free EIB, qui demande au président de la Banque européenne d’investissement (BEI) Werner Hoyer de renforcer la volonté de la banque publique de l’UE de désinvestir des énergies fossiles.

Cher Président Hoyer,

Nous sommes confrontés à une urgence climatique, aux conséquences dévastatrices pour l’homme et l’environnement. Les grèves climatiques dans le monde entier montrent que les citoyens se mobilisent pour lutter contre le réchauffement climatique et réclamer la justice climatique.

Dans ce contexte, alors que les ONG et les collectivités poussent les institutions financières à aligner leurs opérations avec les objectifs de l’Accord de Paris, nous saluons l’ambitieux projet de politique de prêt à l’énergie publié par la Banque européenne d’investissement (BEI) en juillet 2019. Nous sommes reconnaissants pour la direction de la BEI et de son comité de gestion d’avoir élaboré un projet aussi solide.

En particulier, nous accueillons l’accent mis sur le climat dans le premier projet, notamment la reconnaissance du fait qu’il est nécessaire d’émettre des émissions net-zéro pour rester à moins de 1,5 degrés hausse de la température mondiale, la priorité accordée au « principe d’efficacité énergétique d’abord » et aux énergies renouvelables, et la nécessité de soutenir une transition juste pour les travailleurs des secteurs qui connaîtront des changements fondamentaux.

De plus, l’engagement pris dans la première version publiée de la politique de «cesser de prêter de l’argent aux projets liés aux énergies fossiles d’ici la fin de 2020» constituerait une avancée majeure dans la réponse au défi climatique.

Cependant, nous sommes profondément déçus de voir que certaines parties prenantes de la BEI – en particulier la Commission européenne – semblent avoir réussi à affaiblir le projet initialement prévu. Après révision de la version révisée publiée le 27 septembre, nous exprimons notre grande déception devant le nombre de failles pouvant permettre de poursuivre le financement de certains projets liés aux énergies fossiles. Nous craignons que le langage révisé ne permette à de nombreux projets de se faufiler avant que la porte ne soit véritablement fermée au nouveau financement du gaz. En particulier, nous sommes préoccupés par les points suivants:

● Le soutien aux «gaz à faible teneur en carbone» et au captage et stockage du carbone crée des failles, car les exigences sont clairement absentes. Nous sommes particulièrement préoccupés par le fait que le langage soutenant les «connexions à de nouvelles sources de gaz à faible teneur en carbone» et «l’adaptation des infrastructures existantes à un usage crédible et imminent d’un mélange élevé de gaz à faible teneur en carbone» est trop vague, et que des projets à prédominance gaz fossile pourraient encore se poursuivre et être éligible à recevoir un financement;
● La limite d’émissions de 250 gCO2 par kWh pour la production d’électricité doit être «moyennée sur la durée de vie des centrales au gaz cherchant à intégrer des combustibles à faible émission de carbone». Cela risque de permettre le financement de nouveaux projets d’électricité fonctionnant au gaz, comme ils auraient été financés avant la politique révisée, tant qu’il existe un «plan crédible» (un seuil qui n’est pas clairement défini) pour qu’ils se fondent dans des gaz à plus faible teneur en carbone, à une date future non spécifiée;
● Le maintien du soutien aux chaudières à gaz pourrait également poser problème, étant donné le manque de certitude quant à l’intensité future en carbone de l’approvisionnement en gaz;
● Il est possible que les nouveaux projets gaziers soient approuvés avant la fin de 2020, étant donné que le langage révisé semble autoriser la BEI à approuver les projets d’intérêt commun européen (PCI) jusqu’à la fin de 2020, même si ces projets ne sont pas encore en cours d’évaluation ( «dans le système de la BEI»).

Les modifications proposées vont à l’encontre de l’esprit du projet de proposition initial de la BEI et de l’objectif général de l’UE visant à atteindre la neutralité climatique d’ici 2050, ce qui devrait guider les futures décisions d’investissement de la BEI. La clarté du projet initial en signalant une transition rapide des combustibles fossiles s’est estompée.

Néanmoins, nous pensons que la BEI peut toujours ouvrir la voie dans le monde des finances publiques: ainsi, nous vous appelons à rester ferme, à ne pas retarder davantage la fin du financement des énergies fossiles et à retrouver un niveau d’ambition élevé pour la future politique de prêt à l’énergie de la BEI. Si la BEI doit devenir la banque du climat de l’UE et jouer un rôle central dans un Green Deal européen, elle devrait désinvestir des énergies fossiles et arrêter de subventionner davantage de projets liés aux énergies fossiles, dont la durée de vie est susceptible de s’étendre jusqu’à la deuxième moitié de ce siècle.

Nous vous invitons donc instamment à soumettre le projet initial de la nouvelle politique de prêt à l’énergie à un vote lors de la réunion du conseil d’administration de la BEI du 15 octobre. Ce projet reflétait le haut niveau d’ambition de la direction de la BEI et nous soutenons cette ambition.

C’est une occasion unique pour la Banque européenne d’investissement – la Banque de l’UE – d’aider à éviter le dérèglement climatique, en se plaçant au cœur de la transition de l’Europe vers une économie sans ressources fossiles.

Les signataires de cette lettre vous assurent de leur soutien dans cette lutte pour éliminer progressivement les prêts publics aux projets liés aux énergies fossiles.