Une vague de rénovation pour sortir de plusieurs crises

Les attentes d’Energy Cities


En priorité

  • Utiliser des projets de rénovation par quartier pour relier de manière stratégique la rénovation à une transition énergétique plus large
  • Favoriser le déploiement en masse de guichets uniques comme vecteurs locaux fondamentaux pour les immeubles d’habitation
  • Mettre en place un mécanisme européen de financement des rénovations pour accroître les capacités financières des villes en matière de rénovation
  • Réduire les écarts de compétence en donnant la priorité au renforcement des capacités au niveau local

Le contexte
La  vague de rénovation est un pilier du pacte vert pour l’Europe. Bien pensée et accompagnée de la mise en application de la législation existante, cette stratégie peut engendrer une amélioration généralisée des bâtiments à travers le continent. Elle servira de point d’ancrage à la transition à long terme de l’UE vers un continent durable, résilient et neutre pour le climat. Elle jouera également un rôle clé dans une reprise économique et sociale dynamisée par le niveau local face à la crise de la Covid-19 en cours.

Actuellement, des villes de toute l’Europe mettent en place des programmes de rénovation ambitieux avec tous les acteurs clés de l’écosystème du bâtiment. Ensemble, ils créent des emplois locaux, sortent les foyers à faibles revenus de la pauvreté énergétique et engagent les citoyens dans la transition énergétique locale. Cependant, les villes ne peuvent pas accomplir seules cette tâche monumentale qui consiste à « au moins doubler » le taux actuel des rénovations (moins de 1 %). Leurs projets ont besoin de soutiens massifs pour entamer une vague de rénovation poussée par le niveau local. La crise de la Covid-19 montre que si les effets se ressentent d’abord localement, c’est aussi le niveau local qui doit « réparer et préparer la génération future ». Voilà ce que devrait être la grande devise de la vague de rénovation.

Le problème
Les politiques en faveur de la rénovation des bâtiments ont déjà été ambitieuses par le passé mais n’ont pas encore montré tout leur potentiel. Souvent, c’est parce qu’elles ne voient pas au-delà de quatre murs et n’ont pas pris en compte l’interaction cruciale entre les bâtiments et leur environnement direct. Il faut prendre conscience que les bâtiments s’inscrivent dans un écosystème local dynamique de bâtiments, d’entreprises, d’énergies et de personnes interconnectés. En incluant tous ces éléments dans une approche par quartier, nous pouvons augmenter de manière significative le taux de rénovation, créer des emplois locaux durables, réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer le confort et la santé des citoyens européens à la maison, au travail et à l’école.

La solution
En optant pour une approche par quartier pour la vague de rénovation, nous devons évaluer les atouts et les besoins d’une zone élargie et profiter de tout le potentiel de rénovation. Parallèlement, il faut un large éventail d’outils pour motiver et créer le changement pour différents types de bâtiments, de propriétaires et d’occupants, des secteurs public et privé. Mais tout instrument réglementaire ou non-réglementaire ne sera utile que s’il est employé efficacement par les collectivités locales. Aussi, la vague de rénovation doit combiner l’approche par quartier avec un effort important pour renforcer les capacités, le savoir et la capacité financière des villes européennes.

Forte de son expérience de terrain et de son engagement dans des projets de rénovation financés par l’UE (Horizon 2020 INNOVATE pour les guichets uniques, INTERREG NWE ACE-Retrofitting pour les copropriétés et la communauté INTERREG MED pour l’efficacité énergétique des bâtiments publics en Méditerranée), Energy Cities a défini des recommandations en matière de politiques pour la vague de rénovation :

1) Utiliser des projets de rénovation par quartier pour relier de manière stratégique la rénovation à une transition énergétique plus large
Avec une stratégie centrée sur des projets de rénovation urbaine par quartier, la rénovation se fera plus rapide, plus large et plus juste, satisfaisant les besoins de la reprise, tout en accélérant plus généralement la transition énergétique. L’approche par quartier permet d’identifier des projets de rénovation rapides et efficaces comme des projets à long terme, avec une optimisation des coûts et des bénéfices intersectoriels. Avec cette approche, par exemple dans une zone où l’industrie génère des excédents de chaleur, les urbanistes préfèreraient investir dans un réseau de chaleur urbain pour les résidences alentour, plutôt que de promouvoir des pompes à chaleur individuelles en remplacement des chaudières à gaz.  Par ailleurs, une fois les bâtiments rénovés, ils deviennent le lieu idéal pour des projets d’énergie renouvelable communautaire et peuvent fournir, par exemple, de l’électricité renouvelable grâce au photovoltaïque aux habitations environnantes qui ne seraient pas aptes à être équipées en panneaux solaires. Même dans le cas d’habitations prêtes à être équipées, une grande installation locale sera plus efficace qu’une multitude d’installations plus petites.

2) Favoriser le déploiement en masse de guichets uniques comme vecteurs locaux fondamentaux pour les immeubles d’habitation
Les logements sociaux, les écoles et divers bâtiments municipaux constituent souvent le point de départ de la vague de rénovation dans une approche par quartier. Ils n’ont d’ordinaire qu’un seul propriétaire, un accès au soutien de l’administration, et il s’agit pour la plupart de bâtiments de grande taille, standardisés. Cependant, il faut s’attaquer à tous les types de bâtiment si nous souhaitons améliorer de manière significative le parc immobilier européen. Les immeubles d’habitation en copropriété, avec leur ensemble de propriétaires et d’occupants, leurs différentes structures de coûts, leur diversité de construction et de processus de planification, doivent être, eux aussi, rénovés efficacement. Pour ce faire, le déploiement massif de guichets uniques dans les villes, avec leurs paquets de rénovations pour les propriétaires et les occupants, sera essentiel. Les guichets uniques coordonnés par les villes jouent un rôle clé pour garantir une chaîne d’approvisionnement de grande qualité pour les rénovations à chaque étape : évaluation du bâtiment, définition des mesures à mettre en œuvre dans le cadre d’un plan de rénovation global à long terme, choix des entreprises et coordination des rénovations, suivi des travaux et suivi des économies d’énergie. Ces synergies entre les villes et toutes les parties prenantes de l’écosystème immobilier doivent être pleinement exploitées pour augmenter l’impact local des rénovations. À cet égard, des plateformes communes et transparentes impliquant toutes les parties prenantes sont vitales pour satisfaire efficacement la demande et la réalisation de rénovations, mais aussi pour soutenir dans son ensemble le processus de décision par les citoyens en matière de rénovation. Enfin, le déploiement des guichets uniques peut être facilité au niveau européen par une clarification, à travers une révision des règles d’aide d’État, des différentes options compatibles en matière d’aide d’État pour que les villes soutiennent la rénovation de grande qualité des immeubles d’habitation.

3) Mettre en place un mécanisme européen de financement des rénovations pour accroître les capacités financières des villes en matière de rénovation

Parallèlement aux connaissances et capacités adéquates, les villes doivent également jouir de financements massifs. Il convient de mettre en place un mécanisme européen de financement des rénovations afin de dynamiser les investissements des villes. Compte tenu de l’importance capitale de concevoir rapidement des projets (de rénovation profonde) qui agrègent la demande et incluent les changements de systèmes énergétiques locaux nécessaires dans une approche de rénovation par quartier, ce mécanisme devrait avant tout permettre aux villes d’accéder à des produits de financement et de refinancement, ainsi qu’à des subventions européennes, pour couvrir des investissements à long terme qui aillent au-delà des rénovations immédiates. Le mécanisme devrait également combler les manques entre les coûts immédiats de rénovation et la récupération des bénéfices, y compris des avantages non monétaires. Cela passe par un soutien aux villes pour l’agrégation de projets de promoteurs et de propriétaires (par exemple, par des banques commerciales, sociétés de services énergétiques, etc.) à travers des garanties publiques pour améliorer la confiance des intermédiaires financiers en couvrant la perte initiale d’un prêt, et des subventions pour combler l’écart entre bénéfices privés et retours sociaux. Enfin, le mécanisme devrait être complété par une assistance technique, qui s’appuierait sur l’expérience de l’European City Facility. Cela aiderait les villes dotées de financements pour le développement de concepts d’investissements de rénovation par quartier, à gérer et déployer des projets pilotes ainsi qu’à couvrir d’autres coûts essentiels, tels que les coûts des audits énergétiques.

4) Réduire les écarts de compétence en donnant la priorité au renforcement des capacités au niveau local

Un programme de rénovation par quartier ne peut fonctionner que dans des villes dotées des compétences, des capacités et du savoir nécessaires pour planifier et coordonner de tels projets. Les villes ont avant tout besoin de données sur tous les types de bâtiments publics et privés (y compris les copropriétés), pour évaluer au mieux les besoins et les possibilités envisageables, et suivre les améliorations de performance. À cet égard, les cadastres et les observatoires nationaux et européens tiennent un rôle crucial. De plus, les certificats de performance énergétique devraient devenir un instrument plus transparent et fiable pour soutenir au mieux les processus de décision en matière de rénovation, et être inclus dans les passeports de rénovation énergétique. Passeports de rénovation énergétiques et audits énergétiques devraient également suivre un cadre européen commun. Par ailleurs, un standard européen pour des programmes et des certifications de formations à des bâtiments verts devrait être mis au point pour combler l’écart de compétence des villes. Souvent, l’expert de l’énergie d’une administration municipale ne dispose pas du savoir-faire nécessaire pour évaluer correctement les interventions prioritaires et les analyses coûts-avantages correspondantes. À travers ces mesures de renforcement des capacités clés au niveau local, l’apprentissage entre pairs et la comparabilité entre villes peuvent faciliter la planification et la coordination des projets de rénovation par quartier.

Pour approfondir le sujet, avec des exemples de bonnes pratiques

La position d'Energy Cities

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