Quartiers à énergie positive : la voie à suivre pour une transformation ambitieuse des quartiers ?


Oubliez les quartiers à émissions nettes et sans énergie fossile, les quartiers à énergie positive (QEP) visent à produire plus d’énergie renouvelable qu’ils n’en consomment ! Des chercheur‧se‧s de toute l’Europe travaillent à déployer une gestion intelligente de l’énergie afin de transformer nos zones urbaines en districts neutres en carbone.

Les quartiers à énergie positive : un processus et un objectif

Selon l’IPC Urban Europe, un QEP se définit comme « un quartier urbain dont les importations annuelles nettes d’énergie et les émissions nettes de CO₂ sont nulles et dont la production d’énergie renouvelable, intégrée au réseau énergétique urbain et régional, tend à être excédentaire ». Au cours des premiers mois du projet Cities4PEDs, les partenaires ont échangé avec d’autres villes européennes engagées dans des projets de QEP ou autres projets innovants afin d’analyser les principaux aspects à prendre en compte pour aboutir à une définition commune des QEP. Il ressort de cette analyse que les QEP sont à la fois un objectif et un processus. Les QEP reposent en effet sur des objectifs ambitieux en termes de bilan énergétique, qui doit être positif, de performance énergétique, de flexibilité énergétique, d’intégration des systèmes et des infrastructures ou encore d’habitabilité, y compris en termes de durabilité sociale, économique et environnementale. Or de fait, ces objectifs impliquent un processus de transformation (ou de création pour les nouveaux quartiers) qui nécessite des instruments, des méthodes et des partenariats.

Réfléchir à une définition opérationnelle des QEP implique de prendre en compte différents aspects : les différents critères d’évaluation (en plus d’un bilan énergétique annuel positif), les limites du système (par exemple, la mobilité est-elle incluse dans le bilan énergétique ?), la co-appropriation de la transformation par les résidents, la coordination des acteurs locaux, les différentes phases du projet, le système de gouvernance et les liens avec d’autres enjeux locaux, tels que le logement abordable et la qualité de l’espace public.

Ces différents aspects nécessitent un cadre et une procédure de suivi intégrant différents critères afin de mesurer les progrès réalisés, pour chacun d’entre eux, par rapport aux objectifs de transformation. Mais si les mesures quantitatives permettent de vérifier la qualité de la mise en œuvre du QEP (par exemple en termes de consommation d’énergie des bâtiments neufs ou rénovés), elles ne suffisent pas pour activer le processus de transformation : les données brutes ont besoin de récits qui intègrent les facteurs contextuels (nationaux, régionaux et locaux).[1]

Développer des QEP nécessite d’associer instruments municipaux et dynamiques de quartier

L’examen approfondi de 7 études de cas par le consortium Cities4PEDS souligne l’importance du contexte local : il n’existe pas un seul modèle de QEP mais plusieurs typologies de stratégies de QEP associant divers modèles de gouvernance, systèmes énergétiques et types de transformation de quartier. Par exemple, l’aménagement du Port maritime royal de Stockholm peut être considéré comme un exemple de nouveau quartier énergétique très ambitieux, coordonné par la ville, tandis que le quartier Nord à Bruxelles est un district très diversifié dont la transformation est coordonnée de manière décentralisée.

L’analyse souligne l’importance de comprendre le modèle organisationnel spécifique à chaque projet de QEP : gérer les aménagements urbains et le processus de transformation nécessite des ressources importantes, voire même un organisme de gestion dédié. Ce dernier a pour mission de concilier intérêts publics et privés afin de permettre le réaménagement ou la création du quartier, et peut prendre diverses formes : unité de coordination créée au sein de l’administration municipale, plateforme de coordination rassemblant les services de la ville et les parties prenantes extérieures, ou entité à vocation spécifique (semi-)publique, comme celle utilisée pour aménager la zone Aspern Seestadt à Vienne. La municipalité joue un rôle essentiel de facilitateur entre les différents niveaux institutionnels, et avec les promoteurs privés et les acteurs de la société civile.

Les villes qui souhaitent mettre en œuvre un projet de QEP peuvent recourir à divers instruments : contrats de construction d’équipements publics avec les promoteurs, adoption de critères dans les marchés publics ou contrats de cession de terrains. Dans le cas de quartiers neufs, ces instruments sont souvent utilisés pour imposer des objectifs élevés, notamment en termes de production d’énergie renouvelable et d’efficacité énergétique, aux promoteurs et autres parties prenantes. En revanche, ils sont plus difficiles à utiliser dans les quartiers existants.

La co-création et l’appropriation locale des projets de QEP restent un défi car dans les zones nouvellement bâties, les futurs résidents ne sont souvent pas connus au stade du développement du projet. Et dans les quartiers existants, le scepticisme à l’égard des processus de transformation menés par la ville peut également constituer un obstacle. C’est ce qui a incité la ville de Rotterdam à travailler avec la coopérative citoyenne Delfshaven dans le quartier de BoTu : depuis 2018, un engagement financier sur 10 ans permet à la coopérative de construire, avec les habitants, des projets communautaires qui visent à accroître la qualité de vie grâce au concept de communs énergétiques.

Il apparaît clairement qu’il n’existe pas une seule façon de mettre en œuvre des QEP dans nos villes. Mais il est possible d’identifier les résultats obtenus, ainsi que les instruments et les stratégies utilisés, que ce soit dans des quartiers neufs ou existants ; une pollinisation croisée et un apprentissage mutuel sont donc envisageables. La mise en place de QEP nécessite une combinaison d’approches descendantes et ascendantes et une gouvernance formalisée est donc fortement recommandée pour arbitrer les conflits pouvant résulter de ces deux types d’approche. Pour en savoir plus sur les enseignements et les facteurs de réussite issus des sept études de cas, ainsi que sur les stratégies et les instruments à la disposition les villes pour développer les QEP, consultez l’Atlas des QEP.


[1] Pour en savoir plus sur l’intérêt d’une définition européenne des QEP et quels aspects devraient être pris en compte, consultez cette brève publication.

EN SAVOIR PLUS

Regroupées au sein du projet Cities4PEDs, un projet de recherche sur deux ans développé dans le cadre de l’IPC Urban Europe, les villes de Bruxelles, Vienne et Stockholm étudient avec d’autres partenaires locaux comment mettre en place des quartiers à énergie positive (QEP) dans des contextes différents ainsi que les instruments (structures organisationnelles, outils, systèmes énergétiques et méthodes de collaboration) nécessaires à leur déploiement. Apprenez-en plus sur le projet ici.