1990 – 2020 – 2050

Edito politique par Claire Roumet


À propos

Date de publication

09 janvier 2020

Nouvelle décennie, « l’année du point de non-retour » pour l’action climatique, qui commence par des feux titanesques dans l’hémisphère sud… Mais je n’ai pas envie de commenter les catastrophes actuelles ou à venir  pour encore dire l’urgence d’agir.

En 2020, Energy Cities fête ses 30 ans. Comme d’autres réseaux de villes, créés à la veille du Sommet de Rio. Quelle était la situation voilà 30 ans ? Le mur de Berlin venait de tomber, le rideau de fer, qui avait séparé les européen·ne·s pendant aussi presque 30 ans, s’ouvrait.

30 ans, c’est aussi ce qui nous reste pour atteindre la neutralité carbone. 2050, c’est dans 30 ans. C’est une évidence, utile toutefois à illustrer. Et c’est facile pour moi, voilà 30 ans j’étais en voyage scolaire à Berlin, justement, et donc je m’en souviens bien. 30 ans, ce n’est pas une durée infinie. C’est beaucoup et peu. C’est tangible.

C’est aussi fascinant parce que tout a changé ou presque depuis la chute du mur. Tout peut encore changer dans les trente ans qui viennent. Bien sûr, en 1990, pas d’internet, pas de téléphones portables, pas de trottinettes sur les trottoirs, beaucoup moins de plastique dans les supermarchés, les bonnes confitures de ma tante, le vin (pas très bon) de mon grand-père. Beaucoup moins de vacances en avion, ou plus exactement pas d’avion du tout en ce qui me concerne, et un look chez les jeunes en tout point pareil à celui d’aujourd’hui (le changement c’est parfois un retour !).

A la fin de l’année dernière, j’ai eu la chance de passer quelques jours à Tartu, ville du sud de l’Estonie. Elle a vécu la chute de l’empire soviétique voilà 30 ans. En 2003, la part des déplacements en vélo ou à pied était de 45%, elle est encore de presque 30%. Elle est donc bien au dessus de la moyenne des villes européennes, mais quelle régression en seulement 15 ans ! La ville avait un bilan carbone très faible, avec un chauffage urbain 100% alimenté par les renouvelables. Depuis, la demande électrique a explosé, portée principalement par de grands centres commerciaux et le secteur de l’éducation. Le mix électrique énergétique estonien étant basé en grande partie sur une ressource endogène, mais des plus polluantes (huile de schiste), depuis 2010  la consommation énergétique a augmenté de 23% et les émissions de GES de 17%. L’urbanisme de la ville a changé drastiquement également, accompagnant la mutation économique de la ville. En moins de deux décennies.

Il est possible de changer tant de choses à l’échelle d’une ville que je ne doute pas de notre capacité de résilience, ni de notre capacité à développer les alternatives « zéro-carbone » qui impliquent une relocalisation des activités.

Cette visite m’a donné beaucoup d’enthousiasme pour aborder la décennie à venir. Les leaders locaux sont ambitieux et se projettent dans une ville neutre en carbone en 2050. Ils ont bien identifié les leviers, ont cette confiance liée à la mémoire des mutations déjà vécues.

Tartu sera en 2024 Capitale européenne de la Culture. Elle a remporté cette compétition très exigeante en proposant comme fil conducteur de son projet « l’Art de la survie »,  et en le déclinant en trois facettes : « Tartu avec la Terre : l’écologie avant l’économie », « Tartu avec l’humanité : avancer vers nos racines », « Tartu avec l’Europe : la grandeur des petites villes».

Quel meilleur programme pour commencer 2020 ? Je trouve que c’est une belle proposition que j’espère discuter avec tous les membres du réseau Energy Cities, pour préparer les 30 ans qui viennent ; forts de nos 30 ans d’échanges d’expérimentation et de débats !