Stuttgart s’attaque à l’urgence climatique

Première ville allemande à débloquer un budget de 200 millions d’euros face à l’urgence climatique


Tandis que les dirigeants du monde entier font face à l’inaction en matière de climat à la COP25, Stuttgart passe à l’action. Cette ville du sud de l’Allemagne ne se contente pas de déclarer l’état d’urgence climatique. Elle dégage des moyens tangibles pour agir au cours des quatre années à venir. En juillet dernier, le maire Fritz Kuhn a voté un budget supplémentaire et des moyens humains dédiés aux mesures en matière de climat. L’argent provient de l’excédent du fonds municipal pour le climat 2018.

Depuis que le maire Fritz Kuhn (Les Verts) a proposé un plan d’action municipal pour la protection du climat intitulé « Le climat mondial en danger – Stuttgart agit », les mots ont été suivis par des actes. En présentant le plan, le maire a déclaré « nous ne pouvons pas attendre 2050, nous devons faire plus dès maintenant. La nouvelle génération a raison de l’exiger. C’est pourquoi nous avons conçu ce paquet de mesures. Avec ce plan d’action, la ville va passer en revue ce qu’elle a accompli tout en prenant des mesures de plus grande envergure. […] Nous, municipalités, allons de l’avant, en espérant être imitées. Si nous voulons réussir, l’État et le gouvernement fédéral, ainsi que tous les citoyens, doivent nous suivre. »

Pour que ce paquet soit mis en place, le conseil municipal a dégagé 200 millions d’euros de l’excédent de son budget 2018. Cette somme sera transférée dans un fonds ad hoc pour la protection du climat, qui financera l’action pour le climat au cours des quatre prochaines années.

En plus de quatre nouveaux emplois au département de l’énergie, sept autres postes vont être créés : les nouvelles recrues coordonneront la mise en place du plan d’action pour la protection du climat dans l’unité de « protection du climat » qui verra le jour au sein de l’administration municipale.

L’administration entend évaluer ses progrès annuels et faire un état des lieux de la mise en place du plan d’action, qui comprend un vaste ensemble de mesures dans de nombreux secteurs.

La ville va passer en revue ce qu’elle a accompli tout en prenant des mesures de plus grande envergure.

Fritz Kuhn, Maire de Stuttgart

Accélérer la transition énergétique

Les efforts de la ville en matière de protection du climat et de transformation du système énergétique portent déjà leurs fruits : la consommation d’énergie primaire de Stuttgart a diminué de 27 % depuis 1990 et ses émissions de CO2 de 31 %. En 2017, la part des énergies renouvelables de la ville s’élevait à 18 %. Avec le plan d’action, la ville devrait poursuivre ses efforts en élargissant ses cibles : les nouveaux bâtiments publics devront être neutres pour le climat, respecter les standards d’énergie positive, utiliser l’énergie solaire et, en fonction du nombre d’étages, être construits en bois ou en bois hybride. Les toits plats devront être végétalisés, comme les façades à hauteur de 30 %, afin d’améliorer le climat urbain. La ville prévoit d’équiper toutes les écoles d’installations photovoltaïques d’ici 2025.

Les changements de comportement feront l’objet de formations gratuites pour les citoyens au sujet des économies d’énergie. Parallèlement, la ville améliorera ses infrastructures, en développant les réseaux de chaleur ou en facilitant le raccordement à ces réseaux.

Moins de vols, plus de transports publics

Le caractère le plus innovant du plan d’action pour la mobilité de Stuttgart concerne la règlementation du trafic aérien : En tant qu’actionnaire de l’aéroport, la municipalité travaillera à une offre qui exclue tout vol vers une destination atteignable en train en moins de deux heures. L’objectif est d’introduire une taxe pour le transport local afin de financer les transports publics locaux.

Le plan prévoit également le développement important des transports publics et de la mobilité électrique, une réforme du système tarifaire des transports publics, la promotion du vélo et de la circulation piétonne, ou encore l’amélioration continue de la qualité de la vie en supprimant largement les voitures en centre-ville. La ville prévoit également d’augmenter les subventions pour l’entreprise locale de tramway SSB.

Refondre l’administration municipale pour le climat

Le paquet pour l’urgence climatique exigera également que toute décision du conseil municipal respecte le climat. Les voyages d’affaires devront être neutres pour le climat et le parc automobile sera transformé en ce sens. Dans ses cantines, la ville souhaite offrir plus de produits biologiques, ainsi que des produits régionaux et de saison. Dans les écoles et les crèches, la part de nourriture produite localement devra atteindre 50 % dans les quatre prochaines années.

Refroidir la ville

L’adaptation de la ville au réchauffement climatique passe par des « infrastructures vertes » : 1 000 nouveaux arbres et 25 km de haie seront plantés, ainsi que 10 hectares de terrains fleuris. De plus, de nouveaux puits et fontaines d’eau potable seront installés dans des lieux publics et aires de jeu. Les 20 « lieux chauds » pour le climat dans le centre-ville deviendront verts.

L’action municipale ne suffit pas

La ville de Stuttgart appelle le gouvernement fédéral à soutenir ce plan ambitieux, notamment à travers un fort soutien du trafic ferroviaire et la possibilité pour les villes d’introduire une taxe automobile en faveur du transport local.

Afin de faciliter un déploiement massif du solaire, le gouvernement fédéral devrait introduire une règlementation adaptée pour l’électricité domestique et rendre le solaire sur les toits obligatoire pour toute nouvelle construction. Une politique climatique efficace nécessite aussi une limitation de la vitesse au niveau national à 130 km/h sur les autoroutes et une sortie du charbon d’ici 2030. La ville de Stuttgart considère également que taxer la consommation de CO2 est essentiel, allant de pair avec une compensation sociale.

Il y a quelques jours de cela, le conseil fédéral a bloqué plusieurs réformes fiscales prévues dans le dernier paquet national pour la protection du climat, dont l’augmentation de la taxe sur les résidences secondaires, des allègements fiscaux pour la rénovation des bâtiments et une réduction d’impôt sur les billets de train pour les trajets longue distance.