Prêts pour la refonte de la directive relative à l’efficacité énergétique (DEE) ?
L’élaboration volontaire de schémas directeurs des énergies par les collectivités locales peut constituer une bonne base pour transposer la nouvelle obligation, mais un soutien technique et financier supplémentaire est nécessaire pour élaborer des plans ambitieux en matière de chaleur et de froid.
Les plans « climat, air, énergie territoriaux » (PCAET) obligatoires des intercommunalités n’abordent pas suffisamment la chaleur et le froid . Cela s’explique en partie par l’absence de plan global de décarbonation de la chaleur et du froid au niveau national avant 2022 et par la flambée des prix du gaz. L’accent a été mis majoritairement sur l’élimination des chaudières à combustible dans les logements et sur le développement des réseaux urbains de chaleur et de froid, cependant l’élimination progressive du gaz naturel n’était pas une priorité. Plusieurs intercommunalités françaises, principalement les plus grandes et celles de taille moyenne, ont élaboré, de façon volontaire, des schémas directeurs des énergies afin de compléter leurs plans « climat, air, énergie territoriaux » (PCAET) et y intégrer une dimension spatiale. Dans l’ensemble, les collectivités locales manquent de ressources humaines et de moyens financiers pour élaborer des plans détaillés de chaleur et de froid. Toutefois, elles bénéficient d’un cadre global pour accéder à de nombreux ensembles de données qualitatifs.
La planification de la chaleur est volontaire, bien qu’il y ait quelques éléments de planification du chaleur dans les PCAET obligatoires des intercommunalités.
Aperçu des cadres juridiques par niveau de gouvernance
Au niveau national | Depuis 2015 et la Loi de transition énergétique pour la croissance verte, toutes les intercommunalités (regroupement de communes) de plus de 20 000 habitants ont l’obligation d’élaborer des plans d’action en faveur de l’énergie durable et du climat (plans « climat, air, énergie territoriaux » -PCAET), qui incluent la décarbonation des besoins de chaleur et de froid. En outre, les municipalités qui possèdent un réseau public de chaleur de froid urbain, ont l’obligation de produire un schéma directeur tous les 10 ans afin d’étudier sa décarbonation et son expansion. La loi sur l’énergie fixe des objectifs spécifiques au niveau national en termes de consommation de chauffage renouvelable (38 % de la consommation finale de chauffage en 2030) et de diminution de la consommation d’énergie. Elle vise également à multiplier par 5 la fourniture de chaleur et de froid via les réseaux urbains d’énergie d’ici 2030 (par rapport à 2012). |
Au niveau régional | Les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) sont des plans très vastes intégrant des politiques d’aménagement du territoire, de mobilité, d’énergie et de climat au niveau régional. Ils définissent des objectifs en termes d’efficacité énergétique, de production d’énergie renouvelable, d’adaptation au changement climatique et de réduction de la pollution atmosphérique, ainsi que des plans d’actions. Les régions sont spécifiquement chargées de coordonner les études, de partager les informations et de promouvoir les actions en matière d’efficacité énergétique en collaboration avec les collectivités locales. Toutefois, la décarbonation du chauffage n’est qu’une petite composante des schémas, car il n’y a pas d’obligation de planification de celle-ci pour les municipalités. En outre, les régions développent spécifiquement des schémas régionaux biomasse (SRB) afin de mobiliser cette ressource sur leurs territoires. Ces schémas soutiennent souvent le développement de réseaux urbains de chaleur et de froid alimentés par la biomasse. |
Au niveau local | Les plans d’action obligatoires en faveur d’une énergie durable et du climat (PCAET) des intercommunalités de plus de 20 000 habitants doivent être révisés tous les 6 ans et porter sur le développement des énergies renouvelables, la récupération de la chaleur résiduelle, la distribution de la chaleur renouvelable et résiduelle via des réseaux de chauffage urbain, la réduction de la demande d’énergie et l’évolution coordonnée des réseaux d’énergie. Toutefois, ces plans ne comportent pas nécessairement de dimension d’aménagement du territoire ni de plans d’investissement détaillés. Il leur manque souvent une cartographie détaillée et des scénarios de la demande et de l’offre de chaleur et du froid. Certaines collectivités locales françaises ont, de façon volontaire, réalisé une planification du chauffage, souvent dans le cadre plus large d’un schéma directeur des énergies, afin de mieux articuler planification urbaine et planification énergétique. |
Cadre de soutien financier et technique dédié à la planification stratégique de la chaleur et du froid insuffisant, malgré un soutien existant pour les politiques locales en matière d’énergie et de climat
Malgré un cadre de soutien relativement bon pour les politiques locales en matière d’énergie et de climat, il n’existe pas de programme national spécifique visant à éliminer progressivement les combustibles fossiles dans le secteur du chauffage et à soutenir une planification stratégique cohérente en matière de chaleur et de froid au niveau local. Les mécanismes de soutien sont dispersés entre les différents secteurs, technologies et groupes cibles. Dans l’ensemble, les collectivités locales manquent de ressources financières et humaines pour atteindre des objectifs climatiques ambitieux. Toutefois, elles peuvent facilement consulter une grande quantité de données.
Soutien fourni
Technique et organisationnel | 3/5 | L’Agence nationale de la transition écologique (ADEME) apporte un soutien technique et méthodologique à la planification énergétique et territoriale, avec des références et des lignes directrices, telles que le programme « Territoire engagé transition écologique ». Un service de conseil est également proposé pour l’élaboration de PCAET, de schéma directeur en matière de chauffage urbain ou de schéma directeur des énergies, financé par l’ADEME. Cette dernière, ainsi que les régions, proposent différents groupes d’échange et formations. Toutefois, il n’existe pas de catalogue de coûts des technologies, de méthodologies recommandées pour réaliser des évaluations technico-économiques de scénarios, ni d’outil de planification du chauffage approuvé et recommandé au niveau national pour développer des scénarios spatialisés en matière d’énergie. Les collectivités locales peuvent également obtenir un soutien technique de la part d’autres organisations, comme les fédérations nationales de collectivités (telles que AMORCE et FNCCR) ou le centre national d’expertise CEREMA. |
Au niveau financier | 3/5 | Outre le soutien financier pour l’expertise externe mentionné ci-dessus, il existe plusieurs appels à candidatures sur des questions spécifiques liées à la planification du chauffage. Par exemple, le Fonds Chaleur peut financer une partie des études de faisabilité (et le développement) des réseaux urbains de chaleur et de froid . La gestion du Fonds Chaleur peut même être déléguée aux collectivités locales afin de stimuler le développement au niveau local, des réseaux urbains de la chaleur et du froid via un Contrat chaleur renouvelable territorial de 3 ans signé avec l’Agence nationale de la transition écologique. |
Personnel et compétences | 3/5 | Il n’existe pas de soutien dédié au financement du personnel des collectivités locales pour la planification de la chaleur ou de l’énergie. Toutefois, il existe un dispositif financier (Contrat d’objectif territorial) proposé par l’Agence nationale de la transition écologique, qui apporte un soutien aux collectivités locales pour embaucher du personnel afin d’améliorer le développement et la mise en œuvre des PCAET et des plans d’économie circulaire. Cependant, ce dispositif finance le personnel pour une courte période (généralement 3 ans). Les collectivités locales disposent souvent d’un personnel dédié au développement des PCAET et, pour certaines d’entre elles, à la gestion des concessions des réseaux d’énergie (chauffage, gaz, électricité). Toutefois, les collectivités locales manquent de ressources humaines et de compétences spécifiques en matière de planification du chauffage et de modélisation énergétique. Des cabinets de conseil spécialisés sont souvent engagés pour élaborer des schémas directeurs des énergies et des schémas directeurs . Une étude publiée en 2023 estime qu’il faut environ 500 équivalents temps plein (ETP) pour planifier et diriger le développement des réseaux urbains de chaleur et de froid, et environ 3 000 ETP pour élaborer, animer, mettre en œuvre et contrôler les politiques locales en matière d’énergie et de climat. Energy Cities estime qu’il manque environ 16 000 ETP dans les collectivités locales pour atteindre les objectifs de décarbonation dans le secteur du bâtiment d’ici 2030 en France. |
Accès aux données | 4/5 | Les collectivités locales françaises ont facilement accès aux données énergétiques, notamment en ce qui concerne les consommations d’électricité, de gaz, de chauffage, de climatisation et de combustibles. Depuis 2018, les données sont disponibles au niveau de la rue (données agrégées d’au moins 10 points d’approvisionnement dans le secteur résidentiel). Cela est possible grâce à l’article 179 de la Loi de 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte, qui oblige les gestionnaires de réseaux et les fournisseurs de combustibles à partager leurs données publiquement. Les gestionnaires de réseaux de gaz et d’électricité ont mis en place une plateforme de données ouvertes, qui comprend des données sur la localisation des infrastructures énergétiques. Toutefois, il manque souvent des données concernant les capacités restantes des réseaux à un niveau détaillé. Comme les autorités locales ont souvent des capacités insuffisantes pour traiter ces données, les régions et l’Agence nationale de la transition écologique (ADEME) financent des observatoires régionaux qui produisent des inventaires des émissions de GES, des émissions de polluants atmosphériques, ainsi que de la production et de la consommation d’énergie. Plusieurs portails de données rassemblent des données permettant d’évaluer le potentiel de production des différentes sources d’énergie renouvelable. En 2023, deux nouveaux portails de visualisation de données sont en cours de développement afin d’aider les décideurs locaux, l’un pour le développement des énergies renouvelables et l’autre spécifiquement pour le développement des réseaux urbains de chaleur et de froid. Les données sur les certificats de performance énergétique (CPE) des bâtiments sont également accessibles au public, mais elles sont incomplètes. La France dispose d’un cadre relativement bien développé pour le recueil et la gestion des données énergétiques, qui sont à la disposition des collectivités locales. |