À propos

Date de publication

17 juin 2022

C’est le dernier des instruments « soft » proposés par Donella et Denis Meadows dans la version révisée de leur rapport « Les limites de la croissance », en 2004. Après avoir exploré, dans mes précédents éditos, l’inspiration (mai), l’apprentissage (avril), la mise en réseau (mars) et l’amour (février), il nous reste cette évidence : il nous faudra un maximum d’honnêteté pour faire la transition. Et ce n’est pas un hasard si cette question a été débattue par les villes de la Mission européenne “Climate neutral Cities in 2030” lors du lancement de l’initiative le 13 juin, à Bruxelles.

Finalement, c’est peut-être ce qui s’est passé au Parlement européen la semaine dernière, lors du vote tant attendu du paquet climat, le fameux « Fit for 55 » (déjà obsolète puisque la Commission a publié le 18 mai dans son plan « REPower EU » un rehaussement des objectifs de ce paquet !). Pas assez ambitieux, beaucoup trop loin du minimum vital… Les parlementaires veulent une feuille de route plus climato-réaliste pour l’industrie européenne. Et pourtant, même en revoyant sa copie, celle-ci restera très, très en deçà d’une position honnête. Car ce qui serait « honnête », c’est de nous fixer des objectifs cohérents au regard des enjeux.

Ce mois-ci, le conseil politique de la Convention des Maires en Europe a rencontré le premier Vice-Président de la Commission européenne, Frans Timmermans, et la Commissaire européenne à l’énergie, Kadri Simson, pour discuter de la mobilisation des territoires pour réduire nos besoins en énergie, la contribution des villes au plan « EU Save Energy ».  La Commission propose aux États membres d’ajouter un chapitre « Repower EU » à leur plan de relance, ce chapitre pourra être financé par une réallocation des Fonds de cohésion vers la stratégie énergétique nationale. Est-ce une bonne nouvelle ?

Il faut être honnête : la renationalisation d’une partie de la politique de la cohésion, après celle de la Politique agricole commune, (qui peut également être utilisée pour la stratégie RePower EU), ne pourrait être une bonne nouvelle que si (et seulement si !) les plans de relance sont ancrés réellement dans les territoires : conçus, décidés, mis en œuvre avec eux.

Si les investissements dans de nouveaux systèmes socio-économiques locaux permettent à tous les territoires de répondre aux besoins (réduits), favorisent les échanges avec leurs voisins, tissent une toile de micro-interdépendances, c’est une prospérité partagée qui sera construite. Ce sont les territoires qui ont les clefs d’un système énergétique résilient, renouvelable, indépendant, au plus près des ressources et répondant aux besoins.

Ce nouveau chapitre des plans de relance, qui doit permettre de s’affranchir de nos dépendances, doit être une feuille de route claire et concise de nos « phasing-out ». C’est d’une « exit strategy », une stratégie de sortie, dont nous avons besoin aujourd’hui. Et il faut nommer les choses, être radicalement honnête, pour sortir de l’illusion de substitution d’une énergie par une autre. Cette exit strategy, enfin, ne peut faire l’impasse sur nos modes de consommation.

Toute stratégie pour assurer un approvisionnement énergétique doit commencer par les territoires et s’appuyer sur leur diversité.

Pour être honnête, je ne suis pas sûre que ce soit exactement compris ainsi par nos leaders européen·nes. Je ne crois pas non plus que laisser les États définir seuls le chapitre « Repower » des plans d’investissement puisse nous sortir de la logique nationale.

Décrypter les enjeux, les rapports de force qui résulteront des propositions, est une nécessité. Il ne peut y avoir de négociation politique sans confiance. Et pour cela, nous avons besoin, plus que jamais, d’honnêteté intellectuelle et morale.