Lors de la journée d’inspiration d’Energy Cities, qui s’est tenue le 18 octobre dernier à Modène, spécialistes et militants des énergies renouvelables se sont réunis dans la ville imaginaire d’Andria. Le temps d’une journée, nous y avons débattu des défis que représentent l’accès à l’énergie (renouvelable) et la justice énergétique pour toutes et tous. Pas besoin de GPS pour visiter Andria et ses ateliers particulièrement animés. Empathie et bienveillance ont servi de guides.
Abordant le thème de la précarité énergétique, nous avons cherché les moyens de donner de l’espace et de la visibilité à celles et ceux qui se trouvent souvent dans l’angle mort des politiques. Comment leur faire de la place dans le processus de prise de décision et comment les impliquer pleinement dans la transition énergétique ? Que peuvent-ils nous apprendre ? Et pourquoi appelons-nous « vulnérables » les plus forts et les plus résilients ?
Jan de Pauw, ingénieur de projet à la coopérative d’énergie citoyenne Ecopower et conseiller énergie de la ville d’Eeklo (Belgique), a été une grande source d’inspiration. Il a présenté le formidable programme de soutien contre la précarité énergétique lancé par la municipalité d’Eeklo en partenariat avec Ecopower. Ce plan, développé dans le cadre du projet POWER UP, permettra aux foyers à faibles revenus de devenir membres d’une coopérative énergétique. Comment ? La ville préfinance des parts de la coopérative et les prête à des personnes qui seraient incapables d’en payer seules le coût. Au fil des ans, les bénéficiaires rembourseront leur part par petites mensualités. Cependant, dès le premier jour, les actionnaires seront membres de plein droit de la coopérative Ecopower : ils pourront obtenir une énergie renouvelable à un prix juste et auront une voix dans le processus de prise de décision d’Ecopower. Grâce à ce fonds évolutif, l’énergie renouvelable locale deviendra accessible à toutes et à tous. Une première en Europe, que pourraient imiter d’autres collectivités locales désireuses d’aider les personnes en situation de précarité énergétique.
L’Italie devait publier un décret national sur les communautés de l’énergie il y a plusieurs mois de cela. Impatients, nous avons organisé avec Confcooperative, dans le cadre du programme de renforcement des capacités SCCALE 203050, une session de formation sur les communautés de l’énergie pour les fonctionnaires italiens. En dépit d’un cadre juridique complexe et long à mettre en place, les autorités locales s’affairent à déployer les énergies renouvelables et à les mettre entre les mains des citoyens. Elles souhaitent se former dès à présent et entendent renforcer leur collaboration avec les citoyens autour de projets d’énergie renouvelable ! Les participants ont ainsi pu s’inspirer d’exemples de réussite et ont profité des conseils d’homologues italiens sur les étapes pratiques de la création d’une communauté de l’énergie.
L’atelier de l’après-midi se concentrait sur les biens publics pour l’énergie communautaire locale. Ensemble, nous avons exploré tous les lieux où l’énergie renouvelable pouvait trouver sa place dans une ville : toits, façades, parkings, réservoirs d’eau, friches industrielles, même les cimetières ! Cette énergie reste en grande partie inexploitée, car ni les collectivités locales ni les autres acteurs ne savent comment produire ou consommer de l’énergie localement.
Après l’introduction de l’atelier, Anik Lehman-Tron, du service de l’énergie de la ville de Besançon (France), a présenté l’approche de sa ville. Elle est revenue sur sa stratégie visant à quantifier l’énergie renouvelable disponible, à cartographier les espaces pertinents et à identifier les consommateurs et les producteurs dans le quartier de Planoise. Planoise est un quartier à faibles revenus, avec une grande mixité sociale. Après la présentation, le public a pu s’adonner à une séance de questions-réponses. Tous les participants se sont ensuite retrouvés devant une immense carte du quartier de Planoise pour effectuer une analyse collective des espaces et se livrer à un exercice autour de l’offre et de la demande en matière d’énergies renouvelables.
Anna Francis d’Energy Cities a ensuite présenté l’outil de mise en relation des actifs LIFE LOOP. Avec un lancement prévu en décembre, LIFE LOOP est la toute première plateforme européenne qui permet aux villes de montrer à leurs habitants combien elles se soucient du développement des énergies renouvelables et donnent un espace à ceux qui souhaitent investir dans ce domaine !
La ville croate de Poreč a conclu ce rendez-vous en racontant son aventure réussie, Balkan Solar Roofs. S’étant dotée d’une politique locale ambitieuse, qui a donné naissance au « Sunny Office », premier guichet unique de la région, elle a fait avancer le développement des énergies renouvelables à pas de géant.
Nos échanges auraient pu se poursuivre, tant sur les contraintes foncières pour les énergies renouvelables urbaines, que sur les défis liés aux données ou à la modélisation, la participation et la manière dont nous prenons en compte et impliquons les personnes vulnérables… mais le soleil s’est couché sur les petites rues d’Andria.